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POMPEI
LA VIE DE PROVINCE DANS L'EMPIRE ROMAIN[1]

Nous savons très bien de quelle manière on passait le temps à Rome. Les anciens auteurs sont pleins, à ce sujet, de renseignemens curieux. On peut, avec les lettres de Cicéron, refaire la journée d’un homme d’état. Les satires d’Horace nous peignent au naturel l’existence d’un flâneur dont l’occupation principale consiste à se promener au Forum ou le long de la Voie-Sacrée, à regarder les joueurs de balle au champ de Mars, à causer avec les marchands de blé ou de légumes, et le soir à écouter les charlatans et les diseurs de bonne aventure. Juvénal, plus indiscret, nous laisse entrevoir l’intérieur d’un affreux cabaret, rendez-vous des matelots, des voleurs, des esclaves fugitifs, et au fond duquel les employés des pompes funèbres dorment côte à côte avec les prêtres mendians de la grande déesse. Ce qui nous échappe, c’est la vie de province[2]. Il est probable que nous la connaîtrions mieux, si nous avions conservé tout le théâtre latin. Comme les habitans des grandes villes aiment assez à plaisanter du ridicule des petites, on peut supposer que les auteurs de mimes et d’atellanes ne se

  1. Les lecteurs de la Revue n'ont pas oublié l'article intéressant que M. Marc-Monnier a consacré à Pompéi (Revue des Deux Mondes, 1er septembre 1863). Je me garderai bien de le recommencer. Il ne sera pas question ici d'impressions de voyage ; c'est un sujet tout historique que j'essaie de traiter. Pour la description des monumens, je renvoie à M. Marc-Monnier, qui les connaît mieux que personne, et qui a eu l'avantage de recueillir si souvent les explications du savant directeur des fouilles, M. Fiorelli.
  2. J’entends ici le mot province au sens français, tout ce qui n’était pas Rome, et par conséquent l’Italie aussi bien que la Gaule ou l’Espagne. Les Romains faisaient une distinction, et ils ne comprenaient pas d’ordinaire l’Italie dans ce qu’ils appelaient la province.