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dévouement et l’esprit libéral nécessaires pour organiser l’enseignement du peuple.

En résumé, l’ancien régime n’avait rien fait pour éclairer le peuple, personne n’en voyant ni l’utilité ni la convenance. La révolution, attendant tout du progrès et de la diffusion des lumières, avait décrété, avec une ardeur généreuse, diverses lois dont les principes étaient bons, mais pour lesquelles tout avait manqué, le temps, l’argent et les hommes. L’empire, toujours absorbé par le soin de ses armées, avait oublié les écoles, et la restauration les avait abandonnées aux congrégations religieuses. Après 1830, tout était donc à réorganiser ou à créer : c’est ce qu’entreprit M. Guizot avec le concours d’autres hommes éminens, parfaitement préparés à le seconder, MM. Villemain, Cousin, Poisson, Thénard, Gueneau de Mussy et Rendu. De leurs travaux sortit la loi du 28 juin 1833. Comme, malgré quelques regrettables modifications, elle sert encore de base à l’organisation actuelle de l’enseignement primaire, il est nécessaire d’en rappeler les principales dispositions.

Dès l’abord est proclamé le principe à défaut duquel on n’a jamais réussi nulle part. Toute commune est tenue d’entretenir au moins une école où seront reçus gratuitement tous les enfans indigens sans exception. La commune est le prolongement de la famille. C’est l’association primordiale, naturelle, nécessaire, de ceux qui vivent groupés autour d’un même centre et que relient de communs intérêts. S’il est une entreprise dont l’exécution est indispensable à la sécurité, au bien-être de tous, et à laquelle ne peuvent suffire les individus isolés, c’est la commune qui doit y pourvoir. S’agit-il d’un intérêt local, comme l’éclairage ou le pavage des rues, la commune doit tout demander à ses propres ressources. S’agit-il au contraire d’un intérêt à la fois local et général, comme la viabilité et l’instruction, des circonscriptions plus puissantes, le département, l’état, doivent venir au secours des communes trop pauvres, qui, abandonnées à elles-mêmes, resteraient en arrière et entraveraient le progrès de toute la nation. C’est dans ce sens qu’est conçue la loi de 1833. Les dépenses de l’école communale doivent être prises sur les revenus ordinaires de la commune, et, en cas d’insuffisance, sur le produit d’une taxe spéciale, qui ne doit pas excéder trois centimes additionnels au principal de ses contributions directes. Si cela ne suffit pas, le département intervient également au moyen d’une taxe pouvant aller jusqu’à deux centimes additionnels. Au-delà, c’est au budget de l’état de compléter la somme nécessaire. A côté de l’obligation de l’état se trouve inscrit son droit. En cas de mauvaise volonté de la commune ou du département, le gouvernement peut établir par ordonnance les taxes nécessaires à l’entretien de l’école. L’existence de celle-ci était ainsi assurée, point