Page:Revue des Deux Mondes - 1866 - tome 63.djvu/244

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

à la situation du trésor italien. Il faut montrer à présent de quels moyens il dispose pour dominer la crise actuelle, sans oublier qu’il y a deux écueils à éviter dans cette recherche, l’illusion et le découragement.

Prenons pour point de départ ce budget de 1866 qu’on essaie de remanier comme pour en faire un cadre modèle. La dépense totale est de 933 millions (en laissant de côté la dette romaine, qu’il y faudra ajouter). Nous avons vu que les financiers italiens ont déjà admis la possibilité de retrancher sur ce chiffre 55 millions, dont une trentaine seraient gagnés sur l’armée et sur la flotte. Il serait à désirer qu’on fît davantage. On ne manquera pas de dire que l’on a touché les limites du possible. Nous avouons qu’en parcourant des yeux les états de services et de dépenses fournis par les ministères, on reconnaît que les allocations sont en général assez maigres. Cela tient à ce qu’on a calqué les cadres administratifs de la France. L’Italie jeune et pauvre débute avec un luxe de bureaucratie qu’une nation vieille et riche supporte, non pas sans en déplorer l’abus. Ce n’est pas du premier coup que les gouvernemens en sont venus à la manie de tout faire ; il y a en France une foule de services publics qui n’existaient pas autrefois et dont les populations n’éprouvaient pas un vif besoin. Ce qui empêche de simplifier les rouages administratifs, c’est qu’on hésite à trancher dans le vif des situations personnelles. En Italie surtout, on ne saurait pas s’empêcher de changer les traitemens actifs en subsides de disponibilité ou en pensions, et le trésor n’y gagnerait rien. Il y a dans les mœurs politiques de ce pays une familiarité de relations qui dispose à la condescendance réciproque. Un des articles les plus chargés du budget, et sur lequel il y a peut-être moyen de revenir, est celui des pensions que l’on a prodiguées pour indemniser presque tous ceux que la révolution a déclassés.

Le chapitre des dépenses militaires est controversé par les amis de l’Italie avec une légitime anxiété. A vrai dire, les raisonnemens qu’on peut faire sur la nécessité d’un désarmement ont déjà beaucoup perdu de leur force. Le maximum des dépenses de cette nature a été atteint en 1863 : le parlement vota alors pour le ministère de la guerre et celui de la marine 328,140,924 fr., charge énorme, il faut en convenir, pour un état à peine éclos. On a réagi peu à peu depuis cette époque. Nous avons dit plus haut que l’effectif normal en temps de paix comporte 350,000 hommes. On a conservé les cadres, mais ils ne sont pas remplis. D’après le budget préparé pour 1866, avec les réductions offertes par M. Scialoja, l’effectif descendrait probablement au-dessous de 200,000 hommes. Pourrait-on faire davantage ? Cela dépend du point de vue auquel