tion du coton est laissée aux ryots. Ceux-ci ont de la bonne volonté, mais l’argent et l’entente leur manquent. Ils sont pauvres, pressurés, disséminés en villages misérables sur un vaste territoire, hors d’état de s’outiller convenablement. Les compagnies cotonnières et les grandes maisons de commerce leur font bien des avances d’argent sur récoltes pendantes, mais à des taux usuraires qui dévorent le plus clair du bénéfice et réduisent le cultivateur à la portion congrue indispensable pour vivre. Comment dès lors aurait-il de l’élan, de l’émulation, de l’initiative ? Il bêche, laboure, arrose tant bien que mal, récolte au plus vite, et, la cueillette faite, envoie le coton en graine ou même en bolls à son créancier, entre les mains duquel il le consigne pour retirer son obligation. Cette récolte ne lui appartient plus, il ne s’y intéresse guère. Il n’a pas même l’idée de s’assurer le bénéfice du dressing, d’avoir une Mac-Arthy’s cotton gin ; il y gagnerait pourtant la semence, qu’il donne pour rien, et la plus-value sur le coton qui résulte de l’emploi de cette machine. Le consommateur n’y gagnerait pas moins, puisqu’on lui livrerait une fibre étirée et bien nettoyée. On pourrait peut-être espérer voir ce perfectionnement, et bien d’autres qui ne sont pas moins à désirer, s’introduire et se généraliser dans l’agriculture aux Indes, si un bénéfice régulier et légitime inspirait au ryot le goût de l’épargne, si l’instruction, croissant avec le bien-être, l’encourageait à améliorer ses cultures ; mais, tant qu’il sera exploité comme il l’est, il ne faut compter sur rien de semblable.
L’usure, voilà en définitive le plus grand obstacle à tout progrès. La loi de Mahomet était sage de n’admettre aucune des réclamations que provoquent ces honteuses transactions. Le gouvernement des Indes orientales a un moyen bien simple de remédier à cet état de choses ; qu’il réglemente le taux de l’argent, qu’il prenne des mesures pour que les banques agricoles ne deviennent pas les acquéreurs définitifs des récoltes, par cela seul qu’elles ont fait des avances au propriétaire, qui devrait rester maître de disposer du produit de son travail. C’est là de la centralisation, de l’ingérence administrative, de la tutelle, nous dira-t-on. Malheureusement oui : mais cette tutelle est nécessaire, et cela ne fait pas l’éloge des systèmes civilisateurs que la religion dominante, — le dogme de l’argent, — a enfantés en Europe, et que les Anglais, maîtres de l’Inde, mettent en avant dans leurs discours avec tant de complaisance. En abritant leurs actes derrière ces philosophiques tirades, ne rappellent-ils pas les Mèdes envahissant l’Egypte et faisant marcher en tête de leurs armées les animaux révérés sur le bord du Nil ?
En résumé, la moyenne du coton que les Indes ont importé en Europe à partir de 1862 a été de 1,250,000 balles environ, ou