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rien ne coûte comme le bon marché. » Ces dictons populaires deviennent des vérités pratiques.

On a surabondamment prouvé que la monnaie est une marchandise, d’une espèce particulière il est vrai ; il faut se résigner à la traiter comme une marchandise, et il y a contradiction à vouloir user de moyens artificiels pour la faire échapper à la loi régulière du commerce. L’act de 1844 fait éviter cette erreur, c’est le mérite qui le distingue. Les débats récens de la chambre des communes, dont nous avons fidèlement reproduit la substance, montrent combien se trompent ceux qui imaginent que l’on est disposé à l’abroger.


V

Nous avons assisté le 6 juillet 1866 à la réunion du club d’économie politique de Londres. Il ne compte que trente-six membres, mais c’est l’élite des hommes voués à l’étude désintéressée de la science. La question posée par M. Bagehot, l’habile directeur de l’Economist, était celle de savoir s’il valait mieux confier le soin de conserver les réserves disponibles à une banque ou à plusieurs. La matière a été habilement traitée par l’éminent écrivain, mais personne ne s’est prononcé dans le sens d’une division entre plusieurs banques de l’émission des billets. Il va de soi que la société d’économie politique anglaise est unanime pour admettre le système métallique, elle est bullionist sans réserve aucune. Nous regrettons de ne pouvoir donner ici qu’un aperçu rapide d’un débat plein d’intérêt, auquel ont pris part M. Bagehot, lord Overstone, M. William Newmarch, M. Hubbard, M. le professeur Rogers, M. John Stuart Mill, et auquel nous avons été invité à nous mêler. Ce débat avait lieu en présence d’hommes tels que MM. Watkin, Blake, Hankey, le professeur Cairnes, Hare, sir Rowland Hill, Chadwick, le baron Bremwel, Merivale, Thornton, Ch. Villers, l’un des promoteurs de l’abolition de la loi des céréales, Leslie, lord Dufferin, le professeur Farren, du Board of Trade, etc. Des critiques ont été dirigées par M. Newmarch contre la séparation des deux départemens de la Banque, à laquelle il attribue en partie les brusques élévations de l’escompte ; mais personne n’a même fait allusion à une liberté de l’émission livrée à la concurrence. M. Newmarch est le premier à déclarer que l’émission dévolue à la Banque d’Angleterre ne constitue point un privilège, et que, si cette faculté était livrée à tous, aucun banquier sérieux et aucune banque solide ne voudraient s’en servir. Cela nous rejette loin des singulières imaginations de ceux qui prétendent trouver dans la liberté de l’émission, à laquelle ils donnent par erreur le nom de liberté des banques, la source du crédit. « La circulation (currency) a tourné encore plus de têtes que