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Page:Revue des Deux Mondes - 1866 - tome 65.djvu/473

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Lombardie et à Vérone ; mais à Udine, à Trente, elle avait désormais derrière elle, à côté d’elle, l’Allemagne tout entière. Il est certain que les traités de 1815 n’avaient nullement prévu cette introduction de provinces italiennes dans la confédération, cette extension de la frontière germanique, pas plus qu’ils n’avaient prévu les liens de vassalité par lesquels l’Autriche enchaînait les petits états italiens à sa domination au-delà des Alpes.

L’Autriche, de cette façon, par un simple protocole visé à Francfort recevait évidemment un puissant secours ; sous le voile commode d’une frontière arbitrairement tracée, elle se créait une redoutable réserve en faisant de la confédération la gardienne des passages des Alpes. D’un autre côté, elle donnait à l’Allemagne, en compensation de la charge qu’elle lui imposait, une extension de territoire, des positions dominantes vis-à-vis de l’Italie, l’entrée de cette Adriatique qu’on a depuis appelée une mer allemande, et par l’Adriatique l’entrée de la Méditerranée, l’accès de l’Orient. Ainsi se formait ce pacte par lequel l’Allemagne se voyait mêlée aux affaires d’Italie dans une mesure, d’abord restreinte ou mal définie, qui avec la marche des choses n’a fait que s’accentuer en s’agrandissant. Qu’est-il arrivé en effet ? Au premier instant, je le disais, des hommes d’état allemands entrevoyaient cette éventualité comme un péril pour la confédération. Bientôt on n’y a plus vu qu’un droit et une nécessité. On s’est accoutumé au-delà du Rhin à considérer réellement comme un intérêt germanique l’établissement impérial en Italie, et après avoir accepté le bénéfice d’une frontière sur l’Adriatique, sur l’Isonzo et sur le lac de Garde, on en était venu, par des considérations stratégiques, à voir dans la possession de la Vénétie, peut-être même de la Lombardie, ou tout au moins d’une portion de la Lombardie par l’Autriche, une condition de sécurité pour l’Allemagne.

Des causes diverses ont contribué à pousser la politique allemande dans cette voie : un sentiment de solidarité absolutiste de la part des gouvernemens, des habitudes de soumission à l’influence prédominante de la cour de Vienne, des réminiscences du saint-empire. A dater d’un certain moment, l’âpreté débordante et envahissante du patriotisme, germanique s’en est mêlée, — si bien qu’il s’est trouvé un jour, au mois d’août 1848, où en plein parlement de Francfort on a proposé et des mandataires du peuple ont sanctionné cet axiome nouveau, que la ligne du Mincio était nécessaire à l’Allemagne. Des envoyés du vicaire de l’empire furent expédiés à Paris et à Londres pour porter le vote de l’assemblée nationale allemande. Et quel était le premier auteur de cette motion ? C’était un Prussien, M. de Radowitz, un Prussien d’une candide et subtile