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Page:Revue des Deux Mondes - 1866 - tome 65.djvu/939

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dans sa cent-quatre-vingt-seizième séance publique, le mercredi 28 mars 1849, l’assemblée nationale de l’empire, conformément à la constitution qu’elle a fondée, a remis au roi Frédéric-Guillaume IV la dignité d’empereur d’Allemagne à titre héréditaire. Puisse le prince allemand qui tant de fois a exprimé en d’immortelles paroles son chaleureux dévouement à la cause allemande, puisse ce noble prince devenir le soutien de l’unité, de la liberté et de la grandeur de notre patrie, maintenant qu’une assemblée sortie du sein de la nation entière, une assemblée comme il n’y en a jamais eu sur le sol de l’Allemagne, l’a élevé au faîte de l’empire ! Que Dieu soit avec l’Allemagne et son nouvel empereur ! »

Ce n’était là, je le sais bien, qu’une création idéale, un rêve et un fantôme d’empire ; l’effet moral subsistait pourtant, et les 240 voix qui s’étaient abstenues, si forte que fût cette minorité, ne pouvaient diminuer de beaucoup le bénéfice qu’en retirait la Prusse. Un grand nombre de ces voix étaient des voix prussiennes qui refusaient pour Frédéric-Guillaume, un présent auquel l’assemblée avait mis des conditions trop révolutionnaires. Quant aux autres, elles ne représentaient que le morcellement du pays, ce morcellement qu’il s’agissait de faire disparaître, et elles n’avaient pas même un candidat à opposer au roi allemand. Comment donc se fait-il que l’élection du 28 mars 1869 n’ait pas produit plus tôt les conséquences qu’elle renfermait ? Comment la chimère n’est-elle pas devenue plus tôt une réalité ? En d’autres termes, comment Frédéric-Guillaume IV et ses conseillers n’essayèrent-ils pas de mettre à profit cette manifestation du vœu public, sauf à faire modifier ensuite, par le parlement lui-même, tout ce qu’il y avait d’impraticable dans les conditions de la loi ? C’est qu’un homme venait de se révéler, un défenseur de la monarchie des Habsbourg, un politique hardi, qui eût été pour l’Autriche ce qu’a été pour la Prusse M. le comte de Bismark, si la mort ne l’eût frappé au milieu de ses victoires. Ce Bismark autrichien, — la postérité pourra le comparer au ministre du roi Guillaume Ier, quand elle aura en main tous les documens, — ce Bismark autrichien s’appelait le prince de Schwarzenberg.

Le prince de Schwarzenberg était devenu premier ministre de l’empire d’Autriche au moment où l’empire, ébranlé par trois révolutions successives, ramassait toutes ses forces pour échapper à tant de périls et prétendait se reconstituer sur des bases nouvelles. Le 27 novembre 1848, il inaugurait sa politique par une proclamation aussi ferme que hautaine, et cette proclamation annonçait une résistance inflexible à toutes les décisions du parlement de Francfort. Cinq jours après, le 2 novembre, l’empereur Ferdinand Ier, qui