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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 décembre 1866.

Les questions dont la France est aujourd’hui principalement préoccupée, l’affaire de Rome et l’affaire du Mexique, sont arrivées aux échéances fixées d’avance. Le cercle s’est resserré autant que possible ; nous sommes dans le vif des actes et des solutions qui affligent les uns, inquiètent les autres, et en tout cas excitent la curiosité universelle.

Le premier de ces actes décisifs est accompli : l’intervention française a cessé à Rome. L’ère des nouvelles destinées de la papauté au point de vue du temporel est commencée. Peu d’événemens ont dépassé en importance le changement auquel nous assistons. Une série d’accidens et de nécessités politiques qui s’est prolongée dans l’histoire pendant l’espace d’un millenium est en train de finir et d’expirer sous nos yeux. La fonction suprême du sacerdoce catholique avait été alliée depuis mille ans aux soucis, aux manèges, aux luttes, aux ambitions, aux splendeurs, aux entraînemens, en un mot à toutes les vicissitudes de l’autorité politique. Devenue puissance politique, la papauté avait suivi les fortunes des formes politiques qui avaient prévalu dans la civilisation européenne. Elle avait participé aux agitations orageuses de l’époque féodale. À partir du xvie siècle, lorsque la concentration du pouvoir monarchique triompha partout en Europe à peu près, la papauté était, elle aussi, devenue une sorte de souveraineté absolue. Le travail de l’histoire est un entrelacement mystérieux d’idées et d’intérêts, de faits et de souvenirs, de nécessités successives et de créations de l’imagination, d’où naissent avec lenteur et d’une façon presque imperceptible les formes dominantes des institutions et des sociétés. La puissance temporelle de l’église romaine a été l’un des produits les plus surprenans de ce qu’on pourrait appeler la force d’amalgamation du développement historique. Qui eût pu prévoir, à l’origine du christianisme, et l’influence qu’il aurait sur le monde romain et l’influence plus prodigieuse encore qu’au-