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facilement appréciable ; tout le monde sait que, si un coup de canon est tiré dans le lointain, on en voit la lumière bien avant d’en entendre le bruit ; on peut ainsi apprécier sans difficulté le nombre de secondes que le son met à parcourir un intervalle donné. Accessibles à l’expérience directe, les principes de l’acoustique ont été considérés sous leur vrai jour, et on n’a imaginé, pour les expliquer ou pour les coordonner, ni un fluide spécial, ni une force particulière. On a vu dans le son un mouvement vibratoire produit par un ébranlement quelconque et propagé dans un milieu. On n’a introduit dans la physique ni un fluide sonore, ni une force sonore.

Nous pouvons donc ne dire du son que quelques mots. Notons seulement que l’étude des vibrations sonores prend pour nous, au point de vue de l’histoire de la science, une importance toute spéciale. Ce sont les premières vibrations que l’on ait bien connues, et le jour où l’on s’en est rendu un compte exact on a posé une des assises les plus solides de la physique nouvelle. Les faits que cette étude a révélés ont puissamment aidé les grands esprits qui ont fondé la théorie de la lumière. Entre les vibrations sonores et les vibrations lumineuses, on a cherché et trouvé bien des analogies. On a rencontré aussi des dissemblances profondes. En voici une des plus graves et que nous citons tout de suite, sauf à y revenir dans un instant. La vibration sonore a lieu dans le sens de la propagation du son ; chaque molécule de l’air ébranlé exécute un mouvement de va-et-vient le long de la ligne même suivant laquelle le son se propage. Au contraire la vibration lumineuse a lieu perpendiculairement au rayon de lumière. Les dissemblances et les analogies que l’étude a révélées entre les mouvemens sonores et les mouvemens lumineux nous donnent dès l’abord un premier aperçu des problèmes que rencontre la physique nouvelle et des méthodes qu’elle peut employer pour les résoudre.

Nous aurons encore un exemple des recherches sur lesquelles elle appelle les esprits, si nous nous posons ici, à propos du son, une question que nous aurons successivement à nous faire au sujet de tous les phénomènes physiques. Ces divers phénomènes, avons-nous dit, sont susceptibles de se transformer les uns dans les autres, et nous sommes ainsi conduits à leur chercher une commune mesure dans l’effet dynamique qu’ils représentent. Quel est l’effet dynamique d’un son et réciproquement ? ou, pour employer un terme introduit dans le langage des sciences par l’étude de la chaleur, quel est l’équivalent mécanique du son ? Prenons une cloche et frappons-la d’un marteau : nous pourrons estimer directement le travail dû au choc du marteau ; ce sera un certain nombre