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le rapport de l’activité des rayons solaires, et si des données de cette nature pourront s’appliquer à l’agriculture et à l’hygiène.

Ce qui est déjà certain, c’est que les lois qui régissent cet ordre de phénomènes diffèrent entièrement de celles que nous rencontrons dans l’étude des températures. Deux stations qui ont la même température annuelle ou la même température estivale peuvent néanmoins présenter une grande inégalité dans le développement de la flore. Ainsi la température annuelle de Thorshavn, station des îles Farœer située sous le parallèle du 62e degré nord, est à peine inférieure à celle de Carlisle, en Écosse, dont la latitude est de 55 degrés (les deux températures sont respectivement 7, 6 et 8, 3). Néanmoins la quantité de lumière que ces deux points reçoivent pendant une année est fort différente, et une dissemblance analogue se manifeste dans les climats respectifs. L’atmosphère humide et brumeuse des îles Farœer et des Shetlands arrête une partie notable des rayons chimiques du soleil ; aussi la flore y est-elle peu développée : elle se compose de buissons rabougris, et les arbres à fleurs y font défaut. A Carlisle au contraire, on rencontre une végétation luxuriante sous un ciel plus pur. De même, si on compare les températures moyennes de l’été observées à Londres, à Edimbourg et à Reykiavik, en Islande, et qui sont respectivement de 17, de 14 et de 12 degrés, on ne s’attendrait pas aux différences que présente la végétation dans ces trois stations. De Londres à Edimbourg, la différence est à peine marquée malgré l’abaissement de la température ; à Reykiavik, où la température de l’été n’est que de 2 degrés plus basse qu’à Edimbourg, les arbres ne viennent plus. C’est que la situation hyperboréenne de l’Islande comporte un climat chimique bien moins favorable à la végétation que celui des Iles-Britanniques.


II

M. Robert Bunsen, l’illustre chimiste allemand qui partage avec M. Kirchhoff la gloire d’avoir fondé l’analyse spectrale, a commencé en 1853 une série de recherches sur le sujet qui nous occupe. Il eut alors pour collaborateur M. Henry Enfield Roscoe, professeur de chimie au collège Owen, à Manchester ; plusieurs mémoires importans sur la photochimie sont résultés de cette association de deux expérimentateurs habiles et consciencieux. Depuis, M. Roscoe a continué seul les mêmes recherches, et les communications qu’il a faites à plusieurs reprises à la Société royale de Londres et à l’Association britannique ont fini par lui constituer la spécialité de la photochimie. C’est cette longue série de travaux importans que je vais essayer de résumer aussi succinctement que possible.

On a souvent répété, à propos de la découverte de l’analyse spectrale, que les spectres des métaux étaient connus bien avant que MM. Bunsen et Kirchhoff en eussent fait l’objet d’une étude spéciale. Rien de plus vrai sans doute ; mais on ne savait tirer aucun parti de ces spectres que l’on