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LISSA


— 20 juillet


Dès que le nouveau royaume d’Italie, constitué par le traité de Villafranca, eut commencé à s’asseoir, à se rendre compte de ses aspirations, il sentit le besoin de s’appuyer sur une force navale capable de protéger ses côtes de la Méditerranée et de menacer l’Autriche. Être reine de l’Adriatique fut le premier rêve de l’Italie. Que lui fallait-il pour cela ? Une escadre. Les matelots ne lui manquaient pas ; sur son vaste littoral, elle en peut lever par milliers ; les marins de la rivière de Gênes ont même une certaine réputation d’habileté et de valeur parmi les populations maritimes du midi. Ses arsenaux, il est vrai, ne lui offraient pas des instrumens d’action dès longtemps accumulés ; mais cela même était une chance favorable, car, dans la transformation que subit en ce moment la puissance navale, l’ancien matériel de guerre est plutôt une entrave qu’une ressource ; on pourrait presque dire ici : heureuses les nations qui ne sont pas enchaînées aux vieux engins des batailles ! Navires, machines, canons, projectiles, tactique navale, tout aujourd’hui est nouveau. Il lui suffisait d’avoir de l’argent. La naïve confiance des petits capitalistes français qui, dans leur ignorance profonde des affaires publiques, s’imaginent qu’il est au pouvoir de leur gouvernement de garantir la solvabilité de l’Italie, lui en fournit. On évalue à 300 millions de francs les sommes d’emprunt que le jeune royaume a consacrées en cinq ans à se constituer une marine de guerre. Les ateliers de construction et les fonderies de l’Angleterre, des États-Unis, de la France, furent mis à contribution, et quand la Prusse partit pour cette marche foudroyante qui a jeté l’Autriche et l’Allemagne sanglantes et désarmées à ses