Page:Revue des Deux Mondes - 1866 - tome 66.djvu/353

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

jonction des deux métaux ; mais là, on le conçoit, le transport de la matière n’est qu’un accident, un phénomène accessoire, une circonstance toute locale que nous pouvons écarter sans scrupule. Nos conclusions dès lors ne se posent-elles pas d’elles-mêmes ? Ce fluide qui se transporte dans le conducteur n’est autre que la matière impondérable que nous connaissons sous le nom d’éther. Le mouvement électrique de l’éther n’est point d’ailleurs un mouvement vibratoire ; c’est un véritable flux, un transport réel. Nous ne pourrons que nous confirmer dans ces vues, si nous examinons encore rapidement quelques-unes des particularités que présentent les courans.

L’étincelle électrique a été fort étudiée ; elle offre un sujet piquant d’observation. Les physiciens ont toujours eu l’espoir d’y trouver sous une forme saisissante des enseignemens directs sur la nature de l’électricité. Ils ont surtout observé l’étincelle qui sort des machines statiques ; mais leurs conclusions pouvaient légitimement s’étendre à celle que produisent les courans. Il faut le dire, l’étude de l’étincelle a fourni pendant longtemps des argumens trompeurs, elle a surtout servi aux partisans de la théorie des deux fluides. En voyant cette étincelle compacte et brillante aux deux pôles, plus large et plus terne en son milieu, on croyait saisir sur le vif la combinaison de fluides différens : voici, disait-on, le fluide positif qui sort d’un pôle sous forme de panache, et voilà le fluide négatif qui sort de l’autre sous forme d’astérisque. Pour nous, l’éclat des deux pôles provient bien de l’agitation qu’y suscite le flux électrique ; mais le flux peut également produire cet effet en sortant d’un côté et en entrant de l’autre. Cependant, pour prouver qu’un fluide sortait à la fois des deux côtés, on faisait une expérience qui semblait décisive. On forçait l’étincelle à percer plusieurs feuilles de papier, et on montrait que les bords du papier étaient renversés, les uns vers le pôle positif, les autres vers le pôle négatif : résultat fallacieux et d’où l’on ne doit rien conclure sur le sens du flux électrique à chaque pôle. Dans des cas nombreux, un corps percé par une pression présente des bords renversés dans le sens opposé à celui où la pression s’est produite ; il semble alors que le corps perforant ait, dans la seconde partie de la perforation, exercé une sorte d’action de recul. Le renversement symétrique qu’on observe dans les feuilles traversées par l’étincelle ne permet donc pas de conclure au passage d’un double fluide. Au contraire, les récens progrès de la spectroscopie mettent en évidence l’unité du mouvement : on a constaté que le spectre de l’étincelle dépend de la nature du métal qui forme le pôle positif, tandis qu’il reste invariable, si l’on change la nature de l’autre pôle ; les particules métalliques entraînées par le courant montrent donc