Page:Revue des Deux Mondes - 1866 - tome 66.djvu/536

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ces voyages durent six semaines et ont lieu généralement, pour chaque coast-guard, une fois par an. Pendant tout ce temps-là, les femmes restent seules dans leur cottage, comptant les jours avec inquiétude et tremblant à chaque coup de vent qui s’abat sur la mer, car ces parages sont dangereux, et plus d’un marin expérimenté y a laissé ses os. Les navires des gardes-côtes et les petits bâtimens qui les desservent se groupent de temps en temps dans un port de l’Angleterre et sont alors passés en revue par les lords de l’amirauté. Un capitaine et un lieutenant, choisis eux-mêmes dans la marine de l’état, commandent le district et sont logés aux frais du gouvernement. A la tête de chaque station placée sous leurs ordres se trouve en même temps un chef, chief-boatman, qui occupe naturellement la meilleure maison dans l’enclos réservé aux simples gardes-côtes. De tels sous-officiers se reconnaissent à leur casquette portant ces deux lettres de cuivre : G. G. (coast-guard), aux boutons de leur veste bleue frappés d’une ancre et à la couronne brodée d’or et d’écarlate sur la manche du bras gauche. Après vingt ans de service à partir du jour où il a été engagé dans la marine royale, un garde-côtes affaibli par l’âge ou par la maladie peut demander sa retraite. Il obtient alors, à la suite d’un examen et du rapport favorable des médecins, une pension de 20 liv. sterl. (500 francs). Rien ne l’empêche de se livrer en même temps à d’autres occupations; mais il est très rare qu’il s’éloigne des bords de la mer avec laquelle il a contracté tant de liens. Généralement il aime à finir ses jours les regards fixés sur l’immensité des vagues et l’oreille ouverte à ces mille voix de l’océan qui lui racontent l’histoire de sa jeunesse.

L’amirauté préside à tous les intérêts de la marine de l’état; mais elle entretient en même temps plus d’un genre de rapports avec Trinity-house (la maison de la Trinité), qui exerce à peu près les mêmes droits et les mêmes fonctions à l’égard de la marine marchande[1]. C’est pourtant sur un autre théâtre, c’est au milieu des docks de Londres que nous pourrons mieux nous faire une idée du développement de cette seconde branche maritime entée sur le commerce et l’initiative personnelle des Anglais. Qu’on n’oublie point d’ailleurs que la flotte marchande a été le berceau de la flotte royale, et c’est encore au sein des courageux volontaires appartenant à la classe des matelots civils que la marine de guerre britannique recrute incessamment ses forces.

  1. Sur l’origine et les privilèges de cette institution éminemment utile, on peut consulter la livraison du 1er septembre 1864.