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Page:Revue des Deux Mondes - 1866 - tome 66.djvu/774

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New-York et des États-Unis en proie à la guerre civile. Les premiers échecs avaient été prédits d’avance par l’opposition ; l’échec final avait été pressenti par l’instinct général du pays. Qui pourra établir le budget de l’expédition du Mexique ? qui pourra dire les pertes qu’elle a causées à notre armée, la fatigue qu’elle a donnée à notre organisation militaire ? Qui affirmera que l’influence de cette ruineuse diversion ne s’est point fait sentir dans les hésitations et dans les déceptions qui ont marqué cette année la direction de notre politique étrangère en Europe ? Devant cette longue succession de fautes, la France a laissé voir son improbation et n’a point démenti un seul jour sa docilité miraculeuse, et c’est elle qu’on ose accuser d’aveuglement, de parcimonie et de lassitude morale ! Certes, puisqu’il va être mis un terme aux compromissions et aux ruineuses dépenses de l’entreprise mexicaine, nous conseillerons à l’opposition d’être généreuse et indulgente envers le pouvoir. Il faudrait cependant que l’enseignement qui sort avec tant de force d’une telle expérience fût proclamé avec une tranquille énergie. Il est incontestable que l’entreprise mexicaine n’a jamais été voulue par l’opinion publique, et a été l’œuvre de l’initiative du pouvoir. Un plus puissant contrôle de l’opinion eût donc détourné l’erreur à l’origine, ou bien elle en eût atténué les conséquences. Le même esprit de justice et la même sollicitude patriotique devraient donc pousser ensemble le pays et le pouvoir à prendre les précautions connues qui rendent impossibles de pareilles fautes et de pareils mécomptes.

La haute commission formée pour préparer, sous la présidence de l’empereur, la réorganisation de l’armée a eu des réunions fréquentes. Jusqu’à ce que le plan de cette commission ait été achevé et porté à la connaissance du public, il n’est guère raisonnable de discuter les divers systèmes de réserve qui peuvent être présentés. Le débat n’aura de base solide et ne pourra répandre des lumières sur cet intérêt dominant de la politique française que lorsque le plan du gouvernement sera formulé et publié. Il ne semble point que la haute commission, malgré ses délibérations réitérées, ait fort avancé son œuvre. On assure que les objections ont été jusqu’à présent plus fortes que les combinaisons proposées. Il serait temps cependant d’adopter, même à titre provisoire, un système qui jusqu’au vote de la chambre fournirait un aliment utile aux réflexions et à l’élaboration collective de l’opinion publique. L’adoption prompte d’un projet est commandée par l’intérêt de la bonne expédition des affaires. Le budget va dépendre des conditions de la grande réforme militaire. On ne peut porter le budget au conseil d’état tant que la question militaire n’est pas réglée. Si les incertitudes durent encore quelque temps, la réunion du corps législatif ne pourra pas avoir lieu à l’époque habituelle, au mois de janvier ; il faudra peut-être renvoyer au mois de février l’ouverture de la session. Il est d’ailleurs peu sérieux de croire que l’on pourra atteindre du premier coup la forme définitive et parfaite de l’institution qu’il s’agit de réorganiser. Notre sentiment est que la loi future ne sera vraiment bonne