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Cependant, malgré tant d’améliorations successives, Paris n’avait point de poste particulière : il communiquait avec la province, avec l’étranger, mais il ne communiquait pas avec lui-même. Les lettres y étaient portées par les « petits laquais, » par les commissionnaires ; nulle administration spéciale ne se chargeait de les recevoir et de les distribuer. Si l’on en croit Loret (Gazette rimée, 16 août 1653), un essai fut tenté qui ne réussit pas ; les « boëstes » placées aux carrefours principaux et dans les rues les plus fréquentées n’eurent pas grand succès : on s’amusait à les remplir d’immondices, à y faire entrer des souris qui rongeaient les lettres. Furetière en parle avec sévérité et menaces dans le Roman bourgeois, Paris attendit jusqu’au 1er juin 1760 un établissement régulier pour l’échange de sa correspondance urbaine. L’honneur en appartient à M. de Chamousset, dont « la tête était toujours en effervescence pour le bien de l’humanité, » dit l’abbé de Voisenon. Ce fut la poste à un sou d’abord, puis la poste à deux sous, plus communément la petite poste ; elle faisait une distribution par jour, et paraît avoir été accueillie avec reconnaissance par les contemporains : elle resta indépendante jusqu’en 1791, époque où elle se fondit dans la direction générale des postes.

Dès le commencement de la révolution française, on s’occupa de modifier et de fixer l’administration des postes ; elle avait excité de violens mécontentemens, ses abus étaient percés à jour, on en désirait ardemment la réforme ; les cahiers de 1789 en font foi. Les trois services, service de Paris, service de la province, service des messageries, sont réunis sous la direction d’un commissaire-général <(non intéressé aux produits d’exploitation, » et qui doit prêter serment entre les mains du roi (loi du 26-29 août J790). Cette disposition nouvelle était bonne, car dès l’année 1791 le bénéfice net des postes est de 11,668,000 livres. Le comité de salut public ne devait point respecter cette organisation, qui semblait pourtant répondre à tous les besoins du moment ; une loi datée du 24 juillet 1793 nomme neuf administrateurs choisis par la convention même pour diriger les postes ; tous les trois ans, leurs pouvoirs expiraient, mais pouvaient être renouvelés. De quinzaine en quinzaine, ils devaient rendre compte de leur gestion à l’assemblée souveraine, qui seule était apte à prononcer sur leur sort. Le peuple, dans les assemblées de district, nommait lui-même le directeur de la poste aux lettres des quartiers et des cantons. Ce fut à la suite de cette loi que fut adopté le modèle des malles-poste, inventées par Palmer, directeur du Post-Office de Londres, et que l’Angleterre employait depuis 1784. Elles devaient partir tous les jours de Paris, marcher nuit et jour, et faire réglementairement une moyenne de deux lieues à l’heure. Nous les avons connues au temps de notre enfance,