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pas : ils la glorifient au contraire; mais, quoi qu’ils disent, leurs prédilections restent acquises à l’observation externe, à laquelle, en cas de conflit, ils ont coutume de s’en rapporter. Les derniers enfin ne partent pas, comme Hegel et ses disciples, d’un principe indéterminé, dépouillé d’existence et de réalité, simple abstraction logique dont les flancs vides ne contiennent rien; ils ne partent pas non plus, comme les savans idéalistes, du règne inorganique, où ce que nous ignorons dépasse infiniment ce qu’il nous est permis de connaître. Obéissant aux lois les plus élémentaires de la recherche et de la démonstration, ils se persuadent qu’il faut procéder du connu à l’inconnu, et trouvant en eux-mêmes une certaine chose dont rien ne les sépare, qu’ils aperçoivent à plein, qu’il leur est loisible de contempler à leur aise et de pénétrer dans tous les sens jusqu’en ses plus secrètes profondeurs, c’est par cette chose qu’ils commencent leurs études. Ils les commencent là, dis-je, mais ils les achèvent ailleurs : ils écoutent la raison, ils consultent l’expérience, ils lisent les ouvrages des physiciens et des chimistes, qui se croient trop savans pour lire les leurs; en un mot, ils abordent l’interprétation métaphysique de la nature, non pas avec une méthode unique et exclusive, mais avec toutes les puissances de l’esprit réunies et combinées. Ces trois groupes de chercheurs sont-ils tous à la poursuite d’une chimère? Ou, si le but auquel ils aspirent peut être atteint, de ces trois écoles quelle est celle qui semble y marcher le plus directement et s’en rapprocher davantage?


I.

Serait-ce en premier lieu l’école hégélienne? Cette école en effet ne semble pas encore avoir parcouru tout entier le cercle de ses destinées. A peu près éteinte dans cette Allemagne qui fut son berceau, et où l’abandon et quelquefois l’injure lui font expier aujourd’hui l’éclat extraordinaire de ses rapides triomphes, peu populaire en France, où d’ailleurs elle a subi des transformations sous lesquelles elle eût refusé de se reconnaître, elle se ranime aux tièdes rayons du soleil de Naples, au souffle ardent de la jeune et libre Italie. Qui s’y serait attendu? Les étudians napolitains se souviendraient-ils que leur pays s’appela autrefois la Grande-Grèce et qu’il vit fleurir successivement le panthéisme de Pythagore, celui de Parménide et celui d’Empédocle? Malgré de frappantes différences, le sol volcanique de l’Italie méridionale renfermerait-il les mêmes germes philosophiques que la marécageuse Hollande, où naquit Spinoza, et le froid Wurtemberg, qui a eu l’honneur de produire Hegel? La question est difficile à résoudre. D’ailleurs cette