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mettre à la tête des troupes qui, de tous les côtés, descendaient dans le Piémont. Son armée devait se composer, lorsqu’elle serait réunie, de 900 hommes d’armes, de 10,000 Suisses, de 6,000 Gascons sous le comte Pedro Navarro, de 6,000 lansquenets sous le comte de Vaudemont, de 4,000 aventuriers français et d’une artillerie nombreuse. Elle devait être encore renforcée plus tard par un corps d’Italiens aguerris, et le roi d’Angleterre y envoyait sir Robert Jerningham comme son commissaire pour en suivre les opérations et lui compter les 32,000 couronnes qu’il s’était engagé à fournir chaque mois[1].

Au moment où Lautrec partait pour cette expédition décisive, le nonce Acciajuoli annonçait à ses compatriotes les Italiens que ce grand effort de la France serait le dernier, et il les invitait à le seconder d’un ardent et opiniâtre courage[2]. Représentant d’un pape prisonnier, ambassadeur d’une république qui renversait le gouvernement des Médicis et revenait à son ancienne liberté, il avait peu de temps à demeurer en France; mais, avant d’y être remplacé par un nouvel ambassadeur des Florentins, il adressait à Lautrec les plus salutaires exhortations dans l’intérêt de l’entreprise, dont le succès importait également aux deux pays. Lui rappelant les grands objets qu’avait son expédition, la délivrance d’un pape odieusement retenu en captivité, le rétablissement du siège apostolique dans sa dignité, la restitution désirée des enfans du roi, l’heureux affranchissement de l’Italie, il affirmait que l’accomplissement en serait d’autant plus assuré qu’il serait plus prompt. Il l’engageait surtout à s’avancer contre l’armée impériale, demeurée sans chef, tombée dans l’indiscipline, réduite de moitié par les intempérances, les maladies et la peste. « L’état, disait-il, où se trouvent aujourd’hui les impériaux est des pires. Ils n’ont point de capitaines qui les dirigent et qui aient sur eux de l’autorité. Ils sont dans la confusion, désobéissans, et chaque jour ils vont en se mutinant davantage. Si votre excellence pousse vite en avant, elle remportera bientôt sur eux la plus heureuse victoire et les chassera d’Italie, dont elle assurera le salut et la liberté. Que votre excellence ne perde pas de temps à assiéger des villes: qu’elle marche droit par la Romagne vers le royaume de Naples. L’armée

  1. « When this army was assembled, the cardinal delivered the kyng of englandes money that he had brought out of england in barrels, with which money was this armye payed two monethes before hand, and the remnant was delivered to sir Robert Jarnyngham wich was called treasorer of the warres… This armye was called in latin exercitus Angliœ et Galliœ regum pro ponlifice romano congregatus. » Hall’s, Chronicle, the XIX yere of king Henry the VIII, p. 73’2.
  2. Lettre d’Arciajuoli aux dix, du 13 juillet 1527, Négociations diplomatiques de la France avec la Toscane, vol. II.