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« Vos paroles ne suffisent pas pour satisfaire à votre honneur, car J’ai dit et dirai sans mentir que vous avez fait lâchement et méchamment de ne m’avoir pas gardé la foi et promesse que j’ai de vous, selon le traité de Madrid, et en le disant je ne vous charge pas de choses secrètes et non possibles à prouver, puisque cela appert d’écritures signées de votre main dont vous ne pouvez pas vous excuser et que vous ne pouvez pas nier[1]. » Il déclarait que pour éviter l’effusion du sang et mettre fin à la guerre, voulant défendre sa querelle, de sa personne à celle du roi, il acceptait de lui livrer le camp et lui proposait le combat sur la rivière de la Bidassoa, qui séparait les deux pays, entre Fontarabie et Andaye. Il demandait que des gentilshommes fussent dépêchés de part et d’autre sur les lieux pour établir l’égale sûreté du camp et faire le choix des armes. Il finissait en invitant François Ier à ne pas ajouter lui-même la honte de retarder le combat au tort de n’avoir pas accompli les engagemens pris à Madrid[2].

Charles-Quint envoya le héraut d’armes Bourgogne porter ce rude cartel à François P’. D’après les strictes instructions qui lui furent données, le héraut d’armes eut charge de le lire au roi de France avant de le lui remettre. Il portait en même temps une déclaration qui était une réponse, point par point, à la déclaration dont François Ier avait fait accompagner son cartel. Il y était particulièrement soutenu que, durant la maladie du roi, il ne lui avait été rien demandé dont pût avoir regret l’empereur, qui avait usé envers lui de tout honneur et courtoisie; que le traité de Madrid, signé de sa main et de celle de ses ambassadeurs, n’avait été fait que sur sa demande expresse et sur la leur; qu’il avait juré sa foi eau vice-roi de Naples, qui l’avait reçue, et que sa foi ainsi donnée durait en sa force et l’astreignait comme un captif; que prétendre que tout homme gardé ne donnait pas sa foi et ne pouvait s’obliger à rien, c’était allégation de clerc mal appris et plein chicane, et non de roi, de chevalier ni de gentilhomme[3]. François Ier, qui voulait mettre fin aux écritures par un combat, ne devait pas être disposé à ouïr un cartel ainsi motivé et à accepter une pareille déclaration. Il ne pouvait pas se laisser accuser devant sa cour et entendre son intraitable adversaire lui dire : — « Mon très clair droit et votre tort sont si manifestes à Dieu et à tout le monde, que les paroles déshonnêtes contenues en votre cartel sont bien plus à votre répréhension qu’à la mienne. Et puisque j’ai cet

  1. Réponse de l’empereur Charles-Quint à la déclaration faite par le roi de France le 28 mars 1528. Ibid., p. 395 à 405.
  2. Cartel de l’empereur Charles-Quint envoyé au roi François Ier, Ibid., p. 405 à 408.
  3. Instructions de l’empereur à Bourgogne, son héraut d’armes. Ibid., p. 409 à 412.