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comme il l’écrivait à son frère Ferdinand[1], et, au lieu de songer désormais à soumettre les états italiens par la force, il s’efforça de les gagner par des arrangemens que négocia sa prévoyante ambition. C’est à Bologne, où Clément VII était venu l’attendre et le couronner, que le politique empereur régla de concert avec le souverain pontife le sort de l’Italie.

D’un commun accord et à la suite de négociations prudemment conduites, il conclut la paix avec la république de Venise, qui, sans avoir besoin d’y être contrainte par les armes, rendit au royaume de Naples les ports dont elle s’était emparée sur les côtes de l’Adriatique, et restitua les villes de Ravenne et de Cervia, qu’elle avait enlevées au saint-siège. Dans l’intention de rassurer les Vénitiens, qui s’obligèrent à lui payer une somme notable de ducats, et pour satisfaire le pape, que de pressans intérêts le portaient à ménager, il investit Francesco Sforza du duché de Milan. Toutefois il en détacha Monza, transmis à titre de comté à Antonio de Leyva, et il garda entre ses mains la citadelle imprenable de Milan et la forte ville de Como, où il tint garnison espagnole. Maladif et condamné à finir sa vie avant peu, Francesco Sforza devait laisser quelques années plus tard tout le duché à la disposition de Charles-Quint, qui n’en donnerait plus l’investiture à personne. Il ferait ainsi en deux fois ce qu’il ne trouvait pas à propos de précipiter en une seule, et il enserrerait de sa puissance la péninsule entière, dont les deux extrémités lui appartiendraient par le grand fief de Milan, qu’il retiendrait comme empereur, et par le vaste état de Naples, qu’il posséderait comme roi.

Mais en ce moment et par un traité fait le 23 décembre 1529 il unit étroitement avec lui les états naguère ligués avec son rival. La république de Venise, le duc de Milan, le souverain pontife, devenus ses alliés, eurent à préparer la défense de l’Italie supérieure contre toute invasion étrangère[2]. Il espéra en fermer les abords du côté des Alpes et de l’Apennin à l’aide du duc de Savoie, qu’il fortifia en lui donnant le comté d’Asti, et par la vigilance intéressée de la belliqueuse république de Gênes. Frédéric de Gonzague, qui occupait une forte position dans la Basse-Lombardie et que Charles-Quint avait regagné des premiers, reçut de lui, à défaut d’un agrandissement de territoire, une augmentation de titre, et le marquisat de Mantoue fut érigé en duché. Le nouveau duc entra, ainsi que le marquis de Montferrat, le duc de Savoie, les républi-

  1. « La paix fut cause de changer tous mes pensemens. » Lettre de Charles-Quint à Ferdinand, du 11 janvier 1530. — Lanz, vol. Ier, p. 366.
  2. Traité du 23 décembre 1520. — Dans Dumont, Corps diplomatique, vol. IV, 2e partie, p. 53 et suiv.