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éclats et non polis, mais d’un caractère différent des pointes de l’âge de pierre.

La haute antiquité des instrumens en pierre leur fit prêter plus tard chez certains peuples un caractère religieux, et voilà pourquoi l’usage s’en conserva souvent dans le culte. Chez les Juifs, la circoncision se pratiquait avec un couteau de silex ; chez les Romains, on se servait dans le culte de Jupiter Latialis d’une hache de pierre (scena pontificalis), et en Chine, où les métaux sont connus depuis un temps immémorial, les armes en pierre et surtout les couteaux de silex se sont religieusement conservés. L’ordre chronologique des trois âges de la pierre établi, nous n’avons cependant point encore de dates absolues qui nous permettent d’évaluer l’antiquité à laquelle remontent les dépôts que nous venons de signaler. Il faut chercher ailleurs que dans la comparaison des types, des industries, de l’état social qu’elles dénotent, les élémens propres à résoudre ce dernier problème.


III

En observant la lenteur avec laquelle s’opèrent les dépôts qui constituent l’écorce la plus superficielle du globe, on peut juger du temps qu’a nécessité la formation des alluvions où les silex grossièrement travaillés sont retrouvés. Un des plus illustres géologues de notre pays, M. Élie de Beaumont, dans ses Leçons de géologie pratique, a remarqué que les camps retranchés des Romains et les monumens mégalithiques nous fournissent la preuve de la permanence depuis bien des siècles de la surface du sol. Les dolmens accusent cette fixité de niveau non-seulement pour des terrains horizontaux, mais encore pour des terrains inclinés. Là où des rivières charrient du limon et des pierres, où la mer jette du sable et des galets, ronge les falaises, le mouvement d’exhaussement, de déplacement, est plus marqué ; mais il demeure pourtant encore fort lent, ainsi que l’a démontré l’exploration du Delta égyptien. Dans quelques grandes villes seulement le sol s’est rapidement exhaussé. Antérieurement à l’époque historique, il a pu toutefois n’en pas être ainsi, et des révolutions plus multipliées et plus puissantes ont peut-être amené des accumulations plus accélérées. Cette possibilité ne nous permet pas de calculer avec une certaine approximation, en prenant pour élément chronologique les faits actuels de dépôt, l’époque à laquelle remontent les silex taillés, les armes en corne, en os, les poteries que nous déterrons. Les supputations auxquelles on s’est livré à cet égard conservent un grand caractère d’arbitraire. En voici un exemple : un naturaliste suisse, M. Morlot, en étudiant