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manqua d’hommes et même d’armes, tant il avait abusé de la France !

Le douzième et le treizième alinéa méritent d’être cités textuellement :


« Nos lois de recrutement sont excellentes, et elles sont empreintes d’un caractère d’équité et de bienveillance qui les a fait accepter et passer dans les mœurs. On peut dire qu’elles suffisent à toutes les situations.

« Notre organisation militaire présente dans ses cadres assez d’élasticité pour se prêter à l’incorporation d’un nombre d’hommes à peu près double de celui qui s’y trouve aujourd’hui. »


Après avoir lu cet éloge sans restriction, si bien mérité, de nos belles et fortes institutions militaires, on se dit : Pourquoi les modifier ? pourquoi alarmer la France ? pourquoi éveiller l’attention de l’étranger ? Voici la réponse que l’exposé des motifs avait jugé utile de faire par anticipation :


« Il faut commencer par retrancher les non-valeurs organiques, telles que la gendarmerie, les ouvriers militaires et les services d’administration ; les compagnies de cavaliers de remonte, les infirmiers militaires et les hommes hors rangs ; les déficits permanens causés dans les corps de troupes par les hommes aux hôpitaux, en jugement, en détention ou susceptibles d’être réformés, les hommes mariés, les insoumis, etc.. Ces déductions diverses ne s’élèvent pas à moins de 80,000 hommes. D’un autre côté, il faut laisser un corps d’armée en Algérie, remplir au moment d’une guerre les dépôts qui doivent assurer le recrutement des armées en campagne, pourvoir, en l’absence de tout autre moyen régulier et assuré, à la défense des côtes et des places fortes, et au maintien de l’ordre dans l’intérieur.

« Lorsqu’on a satisfait à ces nécessités de premier ordre, l’effectif réellement disponible pour le combat se trouve réduit à 300,000 hommes. »


On a raison de ne pas comprendre dans le chiffre des troupes prêtes au combat la gendarmerie, capable pourtant de renouveler en un cas extrême.ces faits éclatans dont Vittoria et les rares survivans de nos guerres d’Espagne n’ont sans doute point perdu là mémoire. Les nombreuses catégories de non-valeurs dont on a lu tout à l’heure la nomenclature étant déduites, un corps d’armée restant en Algérie, les places fortes et les côtes étant défendues, les dépôts étant convenablement pourvus, l’exposé des motifs par le avec quelque dédain de 300,000 combattans, fusil ou sabre en main, canons attelés ! Nous sommes frappé d’étonnement.

On sait bien à quelles époques de pénible souvenir Napoléon a eu un plus grand nombre de combattans, différens de race et de langage ; ce n’est pas dans les immortelles campagnes d’Austerlitz et d’Iéna.