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qu’elle autorise sont d’avance à demi frappés de stérilité, car, remarquons-le bien, ce n’est pas au sortir du régiment que le soldat prend femme ; c’est généralement beaucoup plus tard, quand il s’est refait un métier, un pécule, assez d’avances pour subvenir aux besoins d’un ménage. La loi qui, en droit, le condamne à sept ans de célibat l’y condamne en fait pour dix ans.

Or le nombre des militaires, qui n’était en 1821 que de 701 pour 100,000 habitans, s’est élevé dix ans plus tard à 931, et à 996 en 1851 ; ce chiffre arrivait en 1861 à 1,213 en ne comptant que l’armée de terre. Au 1er juin 1861, déduction faite des corps étrangers et indigènes, l’armée française comprenait un effectif de 453,801 hommes répartis de la manière suivante ; 369,037 à l’intérieur, 52,160 en Afrique, 19,119 à Rome, 7,383 en Syrie et 6,102 en Chine, et si nous ajoutons le personnel actif de la marine, comprenant 15,574 individus à terre et 39,705 marins embarqués, nous arriverons, pour le total de nos forces, au chiffre de 509,080 hommes.

Il résulte de ces faits que l’âge moyen du mariage est en France très élevé ; de 1853 à 1860, il a varié pour l’homme de trente ans un mois à trente ans et six mois, pour la femme de vingt-six ans à vingt-six ans deux mois. Si cette cause d’infécondité relative des mariages est vraie, nous devrons constater, — chez les nations où le nombre des naissances est considérable, — un abaissement dans le chiffre de l’âge moyen des époux au moment du contrat. C’est en effet ce que nous trouvons en Angleterre, — le seul pays qui nous ait fourni les élémens statistiques indispensables à cette comparaison : — l’âge moyen au moment du mariage y est pour l’homme de vingt-cinq ans et pour la femme de vingt-quatre.

Les recensemens opérés dans les deux pays depuis 1851, classant les individus par sexe, par âge et par état civil, nous permettent d’apprécier quelle est, pour un âge donné, la proportion des célibataires et des hommes mariés ou veufs. Nous avions en 1851 168,038 célibataires de 27 ans et 120,555 hommes mariés ou veufs du même âge, ou, pour rendre la proportion plus facile à saisir, 582 célibataires et 418 hommes mariés sur 10,000 individus mâles âgés de vingt-sept ans. En Angleterre, la proportion est inverse ; sur le même nombre et au même âge, nous trouvons 441 célibataires et 559 hommes mariés ou veufs. La majorité des hommes de vingt-sept ans est donc mariée en Angleterre, et en France à cet âge la grande majorité des hommes vit dans le célibat. Serait-ce qu’en France le mariage est l’exception, tandis qu’il serait la règle en Angleterre ? En aucune façon, car si nous faisons porter nos recherches sur les individus âgés de trente-sept ans, nous en