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Page:Revue des Deux Mondes - 1867 - tome 69.djvu/578

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des fortifications, car la pente des égouts doit être assez raide pour que le courant y soit toujours rapide, et le niveau doit être assez élevé pour que les grandes crues de la Seine ne refluent pas à l’intérieur. Or, si l’on jette les yeux sur une carte des environs de Paris, on remarquera que la Seine, après avoir décrit un long trajet qui la mène jusqu’à Sèvres, se replie sur elle-même en se rapprochant de l’enceinte des fortifications, si bien que le pont d’Asnières n’est distant de la place de la Concorde que de 5 kilomètres en ligne droite, bien qu’il en soit séparé par vingt kilomètres de rivière. À conduire vers ce point le produit des égouts collecteurs, il y avait encore l’avantage de ne pas souiller le fleuve dans le voisinage d’importans centres de population, tels que Auteuil, Boulogne, Saint-Cloud, Courbevoie et Neuilly. Le grand collecteur ou émissaire général fut dirigé de la place Laborde vers Asnières, en traversant par un tunnel les hauteurs de la barrière Monceau, qui séparent ces deux points extrêmes. Cette galerie souterraine, qui mesure 5m60 de large sur 4m40 de haut, est la plus grandiose que l’on ait jamais creusée pour un tel usage ; elle surpasse en dimension la Cloaca maxima, fameuse dans l’antiquité, que Tarquin construisit entre le Forum et le Tibre en vue d’assainir les rues de l’ancienne Rome.

Ce n’est point dans un vain esprit de magnificence que ces canaux, ignorés du public, ont été construits avec des dimensions extraordinaires. Tout a été calculé, qu’on le sache bien, la pente et le niveau du chenal, la hauteur des voûtes, la largeur de la cuvette qui reçoit les eaux sales et des banquettes qui permettent aux ouvriers une circulation facile ; tout a été combiné d’avance, non pas, il est vrai, dans la juste proportion des besoins du moment, mais avec une sage appréciation des exigences que l’avenir imposera. Le drainage d’une grande cité n’est pas une œuvre à recommencer souvent ; les égouts de Rome subsistent encore, après vingt-cinq siècles comme un témoin indestructible que les premiers édiles de la capitale du monde ont laissé de leur prévoyante sollicitude. Il serait trop long d’exposer toutes les circonstances dont l’ingénieur a dû tenir compte ; nous dirons simplement que l’ampleur des galeries était commandée par le besoin de donner un prompt écoulement aux effrayantes masses d’eau qu’une pluie d’averse amène en un instant dans les ruisseaux. La plus forte pluie que l’on ait observée de notre temps, celle du 8 juin 1849, a fourni en une heure 45 millimètres de hauteur d’eau, soit 450 mètres cubes par hectare et près de 1,500,000 mètres cubes pour la surface entière de Paris, telle qu’elle était à cette époque, avant l’annexion des zones suburbaines. Ce qui se passe en pareille circonstance, personne ne