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soir ou lectures constituent un enseignement à la fois populaire et élevé. Le public d’élite qui se réunit chaque vendredi dans le grand amphithéâtre de l’Institution y trouve l’occasion de se tenir au courant de tous les progrès de la science, et les savans anglais ou étrangers qui désirent y faire connaître leurs découvertes sont toujours accueillis avec une hospitalité gracieuse et empressée.

C’est dans le laboratoire de l’Institution royale que sir Humphry Davy a exécuté ses recherches sur les métaux alcalins ; c’est là que Faraday a pour ainsi dire passé sa vie, qu’il a découvert l’induction électrique, le diamagnétisme et tant d’autres choses grandes et mémorables. Les conférences qu’il faisait à l’Institution royale attiraient une foule enthousiaste. « Exact et rigoureux dans le développement de ses idées, dit M. Henri Sainte-Claire Deville, qui en parle d’après ses souvenirs, scrupuleux et même puritain dans la forme, Faraday a toujours enseigné sérieusement et non pas seulement vulgarisé, comme on dit aujourd’hui. Aussi ne doit-on pas s’étonner des respects, des témoignages d’estime et d’affection qui l’accueillent toutes les fois qu’il paraît dans Albemarle-Street, soit comme professeur, soit comme simple auditeur, rôle auquel il s’est aujourd’hui résigné. J’en parle ainsi pour avoir assisté à quelques-unes de ces scènes touchantes qu’on n’oublie jamais. Quand M. Faraday est dans sa chaire, tout ce qu’il dit est vivement compris et accepté avec admiration ; les gentlemen et les ladies qui composent l’auditoire sont presque toujours préparés à ces leçons par une éducation scientifique suffisante. Je ne saurais mieux faire que de comparer une lecture de Faraday devant l’Institution royale à l’exécution d’une symphonie de Mozart ou de Beethoven devant le public mélomane et enthousiaste de notre conservatoire. Quand M. Faraday est lui-même auditeur, placé tout près de celui de ses amis ou de ses élèves qui tient la parole, il s’intéresse à tout ce qui se dit, à tout ce qui se fait. Doué d’une habileté exceptionnelle dans l’usage et le maniement des appareils de physique ou de chimie, il est toujours prêt à donner une aide, à prévenir un accident avec une vivacité juvénile. Le succès du professeur, la réussite des expériences, le préoccupent comme s’il était identifié avec l’Institution tout entière. »

Faraday avait en effet grandi dans l’Institution royale, et lui est resté fidèle jusqu’à sa mort. Il était ne le 22 septembre 1791, à Newington, près Londres. Son père, un pauvre forgeron originaire du Yorkshire, gagnait péniblement sa vie ; il se contenta d’envoyer le jeune Michel à une école primaire jusqu’à l’âge de treize ans, puis il le mit en apprentissage chez un relieur, M. Riebau, de Blandford-Street. Bien souvent le fils du forgeron était surpris lisant les lvres qu’il devait couvrir de carton ou passer en parchemin. Dès qu’il put réaliser de petites économies sur son faible salaire, il les employa à l’acquisition d’ouvrages scientifiques et à