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n’en trouve pas trace dans les autres pyramides. Petites ou moyennes, elles ne sont pas, ainsi qu’on serait tenté de le croire, une reproduction fidèle de la grande. On n’y observe ni les mêmes procédés de construction, ni autant de cavités internes, ni les mêmes rapports de dimension. On soupçonnerait plutôt qu’elles sont l’œuvre d’architectes plus modernes qui ne savaient plus interpréter les symboles énigmatiques que le monument ancien leur laissait sous les yeux. Cette opinion paraît d’autant plus probable que l’image de la pyramide dessinée dans les hiéroglyphes d’une époque relativement récente n’est plus qu’un triangle indécis sans nulle ressemblance avec la forme des temps primitifs.

Faut-il croire avec M. Piazzi Smith que la pyramide eut au début de la civilisation égyptienne un sens caché dont on perdit ensuite la mémoire, ou que les prêtres, gardiens fidèles des mystères religieux, ne révélèrent jamais à leurs contemporains ? Quel serait donc ce sens ? Question posée nombre de fois et à laquelle nulle réponse satisfaisante n’a encore été faite. Le défaut commun des diverses interprétations proposées jusqu’à ce jour est de ne tenir compte que de certains caractères de l’édifice et d’en négliger d’autres qui ne sont pas moins essentiels. C’est le reproche que l’on a fait à ceux qui ne voulaient trouver là qu’un tombeau royal. On en peut dire autant de l’explication proposée par sir John Herschel, qui n’y voyait qu’un observatoire propre à montrer, à l’époque lointaine où il fut construit, la véritable direction de l’étoile polaire. Un astronome égyptien, Mahmoud-Bey, émettait, il n’y a pas longtemps, une théorie nouvelle, fondée comme la précédente sur la coïncidence avec un phénomène céleste. D’après lui, c’eût été un monument consacré à une étoile de la constellation du Chien, Sirius, qui représentait le dieu des morts dans l’ancienne mythologie égyptienne. La pyramide était inclinée de telle sorte que les rayons bienfaisans de Sirius tombaient d’aplomb sur la face méridionale de la pyramide. Aucune de ces suppositions ne rend un compte satisfaisant des minutieux détails de la structure intérieure. L’intention de l’architecte fut sans nul doute moins élémentaire et plus complexe ; c’est du moins ce que semblent révéler les particularités géométriques de ce gigantesque ouvrage.

Il est assurément plus légitime de penser que les prêtres égyptiens voulaient y figurer sous une forme sensible et néanmoins cachée des enseignemens relatifs à la religion, aux mœurs ou aux sciences de leur temps. M. Piazzi Smith prétend, après bien d’autres archéologues, que les traditions qui y sont enfouies ont trait aux poids et aux mesures alors en usage. L’hypothèse n’est pas neuve, mais il s’appuie sur plus de données certaines que ceux qui l’ont précédé dans ce champ de recherches. Ainsi la longueur de la base représenterait un certain multiple de l’unité de longueur, et cette unité ne serait autre chose que la dix-millionième partie du diamètre terrestre. Le prétendu sarcophage serait une unité