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ticles qui pouvaient rentrer sous ces incriminations générales : 1o  faits de violence et sévices contre les personnes, 2o  graves injures, 3o  vols, 4o  usurpation de fonctions ecclésiastiques, 5o  manquemens aux mœurs, 6o  manquemens à la discipline et aux coutumes de l’église, 7o  sédition et trahison politique. C’était un ramas d’imputations, la plupart improbables, plusieurs évidemment calomnieuses, puisées dans les bruits vrais ou faux, imaginaires ou amplifiés, que la méchanceté du parti ennemi faisait courir depuis deux ans contre Chrysostome, mais auxquels le témoignage de l’archidiacre venait donner une consistance inattendue.

Les faits de violence étaient spécifiés dans les articles 1, 2 et 27, et énonçaient que l’archevêque, après avoir chassé et excommunié ce même archidiacre Jean, son accusateur, pour brutalité envers un enfant, son serviteur, avait lui-même fait battre, traîner en prison, enchaîner comme un démoniaque (le libelle ne dit pas pourquoi) un moine qui portait le même nom de Jean, que de plus, se trouvant dans l’église des Apôtres, il avait frappé du poing au visage un certain Memnon de manière à lui faire rendre le sang par le nez et la bouche, ce qui n’avait pas empêché l’accusé de monter à l’autel pour y dire la messe. Plusieurs autres faits de violence furent plus tard ajoutés à ceux-ci.

Les cas d’outrages étaient nombreux et faisaient la matière des articles 5, 6, 8, 9 et 20. D’abord l’archevêque avait insulté les clercs en masse, en les traitant de gens corrompus, prêts à tout faire, « de gens de trois oboles, » suivant l’expression grecque ; il avait même composé contre eux un livre plein de calomnies. On reconnaît là le fameux traité sur les femmes sous-introduites dont il a été question. Il avait de plus qualifié le vénérable Épiphane de fou ou de démoniaque et montré un tel mépris pour le saint évêque Acacius de Bérée (ce saint homme qui savait si bien assaisonner des bouillons pour ses amis), qu’il n’avait pas même daigné lui parler. Enfin l’archevêque avait accusé de vol, en présence de tout son clergé, ses diacres Édaphius, Jean et un troisième, nommé aussi Acacius, prétendant qu’ils lui avaient dérobé son pallium et leur demandant s’ils ne l’avaient pas fait pour certain usage. Ceci demande une explication.

Le pallium était une bande de laine blanche tissée de la plus pure toison d’un jeune agneau, ayant trois doigts de large dans sa longueur et des pendans longs d’une palme terminés par deux lames de plomb enveloppées de soie noire et marquées de quatre croix rouges. C’était un ornement particulier aux évêques de haut rang, patriarches, primats, métropolitains, et l’insigne de la primatie. Le pallium se plaçait autour des épaules de façon à les entourer et à retomber ensuite devant et derrière ; trois épingles d’or