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dynasties pictes, même dans la chronologie plus modeste qui ne commence qu’au Ve siècle après Jésus-Christ, sont moins sûres que les dynasties égyptiennes. C’est à la chute du royaume ou des royaumes pictes vers le milieu du IXe siècle que le nom d’Écosse apparaît dans l’histoire. Encore le pays au nord de la Tweed partageait-il ce nom avec l’Irlande. Toutes ces contrées, formées d’îles et de portions d’îles, portaient le nom de pays des Scots. Les Irlandais n’ont pas alors d’autre dénomination, et ce n’est qu’à partir du XIIIe siècle, à peu près cent ans avant le procès de succession, que les Écossais ont gardé pour eux seuls ce nom qu’ils devaient illustrer dans l’Europe entière. À un certain moment du IXe siècle et par suite des conquêtes d’un roi Kenneth, venu de l’ouest, le pays fut uni sous le nom générique de Scots, puis se divisa encore en highlands sous des princes et chefs de clans et en lowlands sous des rois, pour se réunir encore et définitivement au XVe siècle, deux cents ans avant l’annexion de l’Écosse à l’Angleterre. La différence de langage et de race entre les highlands et les lowlands ne les empêcha pas de se réunir en corps de nation, la ressemblance de langage et de race entre les Écossais et les Anglais ne les empêcha pas de rester séparés et ennemis durant des siècles. Dans les deux cas, ce sont l’utilité, la convenance et le temps, ce ne sont pas la race et le langage qui ont cimenté la nationalité.

Tout ce qui en Écosse précède l’époque de la conquête de l’Angleterre par les Normands est d’une trop grande obscurité pour nous apporter la plus faible lumière sur l’esprit de la nation. Une seule idée éclaire un peu ces ténèbres, la conformité presque certaine des mœurs, de la vie et du gouvernement entre les Scots et les Saxons. Les différences entre les deux peuples semblent avoir commencé après la conquête de l’Angleterre par les Normands. À ce moment, la balance entre les deux civilisations a beaucoup changé. Une association de la barbarie contre une force et une domination déjà policée, tel est le caractère des efforts des Écossais de toute origine contre la royauté anglo-normande. Chose singulière, ils désignent leurs ennemis du nom de Français. Ce nom, qui leur devint cher dans les siècles suivans par nos fidèles services, fut d’abord l’objet de leur haine nationale. Les uns, les plus civilisés, avaient épousé la querelle des Saxons fugitifs qui grossissaient leurs rangs ; les autres, poussés par leur instinct de barbares, combattaient, comme il arrive toujours, une civilisation plus avancée. Quelques-uns même, indépendans de la royauté d’Écosse ; tels que les highlanders et les insulaires, s’associaient à elle dans l’occasion, afin de vaincre l’ennemi commun, l’homme policé, et, pour tout dire, afin de le piller.

La bataille de l’Étendard, en 1138, présente cette situation sous