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Page:Revue des Deux Mondes - 1867 - tome 71.djvu/55

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surveiller eux-mêmes l’emploi de leur argent, et ils apprendraient à administrer une affaire industrielle.

L’esprit d’association a encore donné naissance à d’autres bonnes Ainsi dans les provinces rhénanes il s’est formé des sociétés ayant pour but de servir d’intermédiaire entre les cultivateurs et les constructeurs d’instrumens aratoires. Un dépôt a été établi où ces instrumens sont exposés avec indication du prix ; une légère commission est abandonnée par le vendeur pour couvrir les frais généraux, d’ailleurs très peu considérables. Dans d’autres endroits, notamment dans le district de Trêves, les cultivateurs se réunissent pour acheter et nourrir à frais communs des taureaux de bonne race. C’est l’institution, des haras appliquée à la commune et soutenue uniquement par l’initiative individuelle. Qu’on le remarque bien, ce qui rend ces améliorations possibles, c’est la diffusion de l’instruction dans les campagnes. Sans instruction, les cultivateurs ne parviendraient ni à comprendre les avantages de l’association, ni à s’entendre pour la constituer et la diriger.

Parmi les cultures industrielles, il en est une qui a pris dans ces derniers temps un merveilleux essor en Allemagne : c’est celle de la betterave, qui, comme on sait, favorise singulièrement tous les progrès agricoles. Par un curieux échange de services réciproques entre peuples voisins, c’est un Allemand, Marggraf, qui le premier a conçu l’idée d’extraire du sucre de cette racine indigène, et c’est un Français, Achard, qui a introduit cette industrie en Allemagne, où elle s’est si rapidement développée à partir de 1836. En 1837, on comptait dans le Zollverein 122 fabriques qui de 25 millions de kilos de racines extrayaient seulement 1,408,000 kilos de sucre, ce qui constitue un rendement de 5 pour 100. En 1851, il y avait 184 fabriques, et 736 millions de kilos de betteraves produisaient 53 millions de kilos de sucre, soit un rendement de 7,25 pour 100. La production correspondait à 1 kilo 565 grammes par habitant. En 1865, 270 fabriques ont travaillé 2 milliards de kilos de betteraves, livrant à la consommation 170 millions de kilos de sucre ou 5 kilos 130 grammes par tête. En France, la production donnait 4 kilos par tête. Le rendement montait à 8 1/2 pour 100. La production moyenne par fabrique était de 632,000 kilos de sucre, tandis qu’en France elle ne s’élevait qu’à la moitié ; mais le nombre des fabriques était plus grand : il était de 364. Sur les 270 fabriques du Zollverein, 234 étaient prussiennes. Si le développement de l’industrie saccharine est beaucoup plus rapide en Prusse, où en dix ans elle a triplé, qu’il ne l’est en France, cela tient d’abord à la modicité relative des droits, ensuite au mode mieux entendu de perception. Les droits d’accise s’élèvent en France et en Belgique à 45 francs par 100 kilos, en Prusse à 22 fr. 50 centimes