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Selon nous, c’est la plus haute expression du beau pittoresque en architecture. L’art persan, joint aux matériaux superbes de ces contrées, a produit des chefs-d’œuvre qu’on ne peut se lasser d’admirer. Nous citerons plus particulièrement les vues d’Amristur, celle de la porte d’or du temple sikh, la mosquée Jumma d’Ahmedabad, les grilles en dentelle de marbre du sarcophage de Tag-Mahal à Agra, la vue générale de Beejapour, puis les détails du tombeau de Begurn-Sahib, la mosquée de Jakout-Daboudi, celle d’Ibrahim-Roza et son mausolée, toujours dans la même ville, la porte de Secundra prise des jardins, l’Hosiainabad-Emambara de Lucknow, les façades diverses du Tag-Mahal d’Agra, surtout celle qui regarde les bords de la rivière, le palais Seerhutee de Dharwar, le temple Jain à Delhi avec son balcon délicieux et les jardins du palais Deeg à Rajpootana. Il y en a cent autres, et ce serait sans contredit la plus intéressante collection que pourrait faire un musée d’architecture. A chaque pas, nous retrouvons ici l’influence de la domination persane sur ces contrées, à l’époque la plus brillante de sa puissance et de sa splendeur.

Les vitrines où sont placés les bijoux de l’Inde n’offrent pas de pierreries d’une bien grande valeur. On voit que c’est non pas la beauté des pierres, mais l’originalité de la monture qui les a fait choisir. Cette absence d’uniformité, de raideur, de régularité trop absolue dans le travail de l’or et l’arrangement des pierres précieuses donne à ces objets un charme particulier. Voici une boîte en or et rubis qui attire et charme les yeux. De la grosseur d’une orange, elle est formée de doubles zigzags en cloisons d’or enchâssant des rubis dont la taille, la forme, la couleur et la monture représentent les grains de la grenade retenus dans leur gangue. Rien n’est parfait comme ce bijou. Pour ces peuples qui vivent en plein air, la nature, si belle et si variée chez eux, est le modèle sans cesse présent, sans cesse consulté. Les laques de Bhangulpore, les bois de santal sculptés et incrustés d’ivoire, sont d’une finesse remarquable. Calcutta et Bombay ont envoyé des meubles de bois de fer et d’ébène travaillés à jour comme une dentelle ; malheureusement la forme anglaise qu’on leur a donnée et les hideuses étoffes, de tapisserie qui les recouvrent en détruisent tout le charme.

Nous ne ferons que passer devant ces admirables tissus, impossibles à décrire, qui reflètent vaguement dans leurs broderies fantastiques le soleil, les fleurs et les oiseaux des paysages de l’Asie, dont l’éclat résume en un mot tout l’éblouissement du monde tropical. Ainsi sans effets criards, sans bizarreries mélodiques, en passant par les plus habiles transitions ou contrastes, ils réunissent tous les tons et toutes les nuances. Les Orientaux connaissent à