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Il reconnut son erreur sans effacer sa faute, et, laissant les républicains faire au général Sheridan des ovations triomphales, il se remit à méditer sur ce qu’il pouvait bien tenter pour la délivrance des états du sud.

Ceux-ci étaient en ce moment très irrités. On avait toujours remarqué que le langage du président était le thermomètre fidèle de leur humeur. Le président devenait-il pacifique, le sud aussitôt semblait plus calme. Faisait-il mine de tirer l’épée, aussitôt le sud éclatait en plaintes. Cette influence, qui aurait pu lui servir à faire beaucoup de bien, avait été consacrée tout entière à exciter dans le sud une résistance toujours inutile et souvent funeste. Prolonger cette résistance était aujourd’hui sa dernière ressource. Il fit dire à ses amis de ne pas se laisser abattre, de recourir encore aux voies légales en dépit de l’interdiction du congrès, et de traduire les chefs militaires devant les tribunaux de leurs états. Il espérait que ces procès n’arriveraient à la cour suprême qu’après des élections démocratiques qui intimideraient la majorité de la chambre. Battu au nord dans toutes les rencontres, il se réfugiait auprès des hommes du sud pour y attendre le réveil démocratique qui devait lui assurer la victoire.

Ces espérances n’étaient pas tout à fait chimériques ; les élections de fin d’année accusaient une diminution notable de l’influence républicaine. On n’avait pourtant à nommer ni président ni congrès : les élections portaient tout entières sur les fonctions locales et sur le gouvernement des états ; mais elles n’avaient guère moins d’importance que les grandes élections de l’année dernière, car les partis en Amérique ont la coutume de se grouper toujours autour des principes supérieurs qui gouvernent la politique générale. Or les principes démocratiques semblaient plus en honneur cette année que les principes républicains. Non-seulement le Maryland, le Kentucky, le Connecticut lui-même, avaient favorisé les démocrates, mais les majorités républicaines étaient partout réduites. Dans le Vermont, dans le New-Hampshire, dans le Maine, où le parti républicain avait perdu 15,000 voix depuis l’année dernière, dans la Californie, où il avait succombé, les démocrates étaient sinon triomphans, du moins pleins d’espérance et de confiance dans l’avenir. Les élections des grands états du centre, l’Ohio, la Pensylvanie, l’Indiana et l’Iowa, devaient avoir lieu le 8 octobre, celles de New-York et de New-Jersey devaient suivre quelques jours plus tard, et le pays les attendait comme un jugement suprême. Les démocrates se croyaient sûrs de l’emporter en Pensylvanie, et, s’il faut en croire une ancienne expérience, le parti victorieux en Pensylvanie triomphe toujours dans le pays entier.

C’est maintenant une question vidée. Les républicains ont eu le