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Page:Revue des Deux Mondes - 1867 - tome 72.djvu/633

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Macerata, de Fermo, de Spolette. « Mon intention est que toutes, les troupes françaises qui se trouvent dans les états du pape doivent être habillées, nourries et soldées par le pape. Cela ne laissera pas que de faire une assez grande économie[1]. » Il y répondit aussi en écrivant qu’on eût soin à Milan d’empêcher le cardinal de Bayanne « de passer outre. » — « Vous lui demanderez, écrivait-il au prince, Eugène, si dans son âme et conscience de cardinal il croit ses pouvoirs et ses instructions suffisans pour arranger tous les points de discussion qui existent avec la cour de Rome. S’il ne se croit pas > assez autorisé, il doit écrire à Rome qu’il a été retenu à Milan, vu les explications qu’on lui a demandées[2]… »


A la même époque (21 septembre 1807), comme s’il craignait que les mesures que nous venons d’énumérer ne fussent pas encore assez blessantes, l’empereur donna ordre à M. de Champagny de passer au cardinal Caprara une note dont le ton semblait calculé de façon à amener décidément cette rupture qu’il souhaitait avec tant d’impatience.


« Il n’importe pas beaucoup à l’empereur que Rome ait sept ou huit Anglais de moins ; mais ce qui lui importe, c’est que le souverain temporel de Rome marche dans le système de la France, que, placé au milieu du grand empire, environné de ses armées, il ne soit pas étranger à ses intérêts, à sa politique. Rome ne s’est jamais séparée de la politique de l’Europe ; souvent elle y a joué un rôle trop actif, et ses princes ont été plus d’une fois les moteurs des guerres qui ont désolé cette partie du monde. On a blâmé dans les papes cette politique, quand elle a été mauvaise, fondée sur l’injustice ou la mauvaise foi ; mais on n’a jamais prétendu qu’en agissant comme souverains temporels ils violassent, les devoirs imposés au chef de l’église. Mettre en avant un tel argument, c’est s’accuser soi-même d’ignorance ou de mauvaise foi. L’empereur ne demande au pape de se liguer avec lui que contre les infidèles, ce que le saint-siège a toujours regardé comme un devoir, et contre les Anglais, nation hérétique qui traite même chez elle les catholiques en ennemis. L’empereur demande cela au pape, et il peut le demander comme un droit de sa couronne. Souverain de l’empire de Charlemagne et héritier de ses droits, il doit se souvenir que la donation faite par ce prince au saint-siège renfermait la condition tacite de ne point agir contre les intérêts de son empire et de faire cause commune avec lui et avec ses successeurs, car sans doute Charlemagne n’aurait pas voulu donner des armes contre sa propre puissance. La cause que l’on propose au pape

  1. Lettre de l’empereur au prince Eugène, 25 septembre 1807. — Correspondance de Napoléon Ier, t. XVI, p. 48.
  2. Lettre de l’empereur au vice-roi d’Italie, 28 septembre 1807. — Correspondance de Napoléon Ier, t. XVI, p. 54.