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Napoléon avait pris, lui aussi, sa résolution définitive. Un semblant de négociation continua encore entre M. de Champagny et le cardinal Caprara, ayant surtout pour but de détourner l’attention de la cour de Rome des mesures qui se préparaient contre elle. Tout avait été d’ailleurs combiné à l’avance pour cette hypothèse de la résistance du saint-père. Les forces françaises que l’empereur destinait à l’expédition contre Rome étaient depuis un certain temps groupées à dessein près des limites du domaine de saint Pierre, tant du côté du nord que du midi. Un militaire distingué, le général Miollis, était l’homme que l’empereur avait, par anticipation, décidé de mettre à leur tête comme étant dans sa pensée l’homme le plus capable par ses antécédens, par ses opinions, son énergie et aussi par sa modération et par sa présence d’esprit, de mener à bien une opération si délicate. Pour en régler le détail, l’empereur toutefois ne s’en rapportait, comme à son ordinaire, qu’à lui-même. On va le voir, dans les deux lettres suivantes au prince Eugène et au roi de Naples, arranger tout le plan de cette campagne contre Rome et contre Pie VII avec le même soin que s’il avait été question d’agir contre la place la mieux fortifiée et le prince le plus puissant de la terre.


« Mon fils, immédiatement après la réception de la présente lettre, expédiez l’ordre au général Miollis de diriger sur Pérouse toute son artillerie, sa cavalerie et son infanterie, hormis un bataillon qu’il laissera pour la police de Florence et un pour la police de Livourne. Donnez l’ordre au général Lemarrois de mettre en marche sur Foligno toutes ses troupes, infanterie et artillerie, hormis un bataillon qu’il laissera pour la garde d’Ancône. Je compte que le général Miollis pourra réunir 2,500 hommes et le général Lemarrois autant, ce qui fera 5,000 hommes. Les troupes du général Lemarrois seront sous le commandement d’un général de brigade ; arrivées à Foligno, elles seront sous les ordres du général Miollis. Les marches seront calculées pour que les troupes du général Lemarrois arrivent à Foligno le même jour que les troupes du général Miollis arriveront à Pérouse. Je donne ordre au roi de Naples de réunir à Terracine une colonne de 3,000 hommes. Le général Miollis se rendra à Pérouse, en partira avec la colonne qui y sera réunie, prendra sous son commandement la colonne de Foligno, et continuera sa route sur Rome sous prétexte de traverser cette ville pour se rendre à Naples. Les ordres seront donnés de manière que la colonne de 3,000 hommes de Terracine soit en mesure de se diriger en grande marche, et sans perdre de temps, sur Rome du moment que le général Miollis y sera entré. Le général Miollis à son arrivée prendra possession du château Saint-Ange, rendra au pape tous les honneurs possibles, et déclarera qu’il a mission d’occuper Rome et le château Saint-Ange pour arrêter les