Page:Revue des Deux Mondes - 1867 - tome 72.djvu/724

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
LA SECONDE
EXPEDITION DE ROME

Le monde actuel est livré aux troubles et aux vertiges. Il vit entre toute sorte de conflagrations, de révolutions et d’incendies qui le menacent, qui peuvent le dévorer, le ruiner, le rajeunir peut-être, et, si lord Palmerston vivait encore, c’est bien aujourd’hui que sa verve narquoise pourrait montrer à la surface de l’Europe assez d’élémens combustibles pour allumer une demi-douzaine de guerres. — Que vous faut-il ? Guerres d’ambition et de prépondérance, guerres d’équilibre, guerres de nationalité et de race ou même guerres de religion, il n’y a que le choix ; mais assurément, de toutes les guerres, la plus imprévue, la plus étrange, la plus impossible, quoiqu’elle ait paru un moment inévitable, est celle qui eût fait de l’Italie et de la France deux sœurs ennemies en les appelant autour de Rome pour vider par les armes, en face du dôme de Saint-Pierre, une question toute morale que la force ne peut résoudre. La veille encore le monde semble vivre dans une somnolente quiétude sur toutes ces affaires de Rome, et ce n’est point certainement de ce côté qu’on s’attend à voir jaillir la première étincelle des grandes luttes. Le lendemain, Garibaldi s’élance de son île, rallie à son drapeau d’aventure des légions de volontaires, et court livrer un dernier assaut à la papauté temporelle. L’Italie hésite entre les engagemens qui la retiennent et un entraînement national qui la pousse en avant. Une armée française cingle de nouveau vers Civita-Vecchia pour aller reprendre sa faction au Vatican, tandis que les soldats italiens entrent de leur