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Page:Revue des Deux Mondes - 1867 - tome 72.djvu/741

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cabinet dont le général Cialdini, appelé par le roi, paraissait devoir être le chef, cette éventualité, dis-je, suffisait pour suspendre le départ de l’expédition française qui attendait à Toulon. Pendant huit jours encore, on réussit à détourner l’intervention. Par malheur, là où il eût fallu un ministère dans les vingt-quatre heures pour rendre une attitude à l’Italie, c’était un interrègne qui s’ouvrait ; c’était une crise laborieuse durant laquelle le général Cialdini, esprit plus accoutumé à la guerre qu’aux combinaisons des partis, se perdait en efforts aussi infructueux que prolongés pour rassembler des hommes décidés à accepter avec lui la responsabilité d’une retraite ou d’une halte de la politique italienne. Le problème, n’était pas à la vérité facile à résoudre. Il s’agissait de ne pas donner à cette retraite un caractère trop pénible, de ménager le sentiment national et en même temps d’ôter à la France toute raison d’intervenir. D’autres que le général Cialdini y eussent échoué. Que résultait-il de cet interrègne ? Garibaldi profitait de la circonstance ; il s’évadait de Caprera, accourait à Florence et passionnait la foule par ses harangues enflammées. L’idée vint bien à quelques personnes de sang-froid que, puisqu’on avait arrêté Garibaldi une première fois, on pouvait l’arrêter une seconde fois ; mais quand on alla chez le général Cialdini, celui-ci se récusa parce qu’il n’était pas encore ministre ; quand on alla chez M. Rattazzi, le président du conseil démissionnaire objecta qu’il n’était plus ministre. Pendant ce temps, Garibaldi quittait triomphalement Florence par un train spécial que lui faisait préparer M. Crispi, et qui le conduisait à Terni.

Dès lors, dans cette éclipse de tout gouvernement, le destin de l’Italie s’accomplissait. L’apparition de Garibaldi sur le territoire pontifical appelait l’intervention française. Le dénoûment était facile à prévoir, dût-il être sanglant, et c’est en face de cet enchaînement de complications de jour en jour aggravées que naissait enfin un cabinet, non plus sous la direction du général Cialdini, mais sous la présidence du général Ménabréa, avec le concours de M. Gualterio. On l’a appelé un ministère de réaction : ce n’est pas cela ; c’est un ministère de sauvetage, venu pour réparer de sérieuses avaries, pour conduire un navire fort endommagé sans laisser périr la fortune de l’Italie, en faisant flotter encore au contraire le drapeau de la politique nationale. Là est le secret de ce qu’il a fait, de ses actes et de ses paroles. Je résume donc ce qui touche à l’origine et à la suite de cette crise. Au premier moment, M. Rattazzi multiplie les protestations de fidélité à la convention du 15 septembre, et laisse grandir une agitation dont il atténue sans cesse la gravité jusqu’à ce qu’il se déclare hors d’état de la maîtriser ; au