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pour régler entre les particuliers tous les différends où la somme en litige ne dépasse point 501iv. st. (1,500 fr.). Ce tribunal civil étonne par la simplicité de sa procédure. Le plus souvent, c’est le juge qui décide ; mais les deux parties engagées dans le procès peuvent néanmoins réclamer un jury qui, en pareil cas, se compose de cinq personnes. Ainsi que l’indique le nom, les cours de quarter sessions siègent quatre fois par an dans chaque comté de l’Angleterre. Leur juridiction criminelle se trouve limitée par un bill édicté depuis l’avènement au trône de la reine Victoria. Ces tribunaux ne peuvent condamner un homme à mort ni à des peines très fortes ; leur compétence n’embrasse qu’un certain ordre de délits. Dans les comtés ruraux, ces quarter sessions se tiennent devant les juges de paix (Justices of the peace), et c’est l’un d’eux qui préside. Au sein de quelques districts populeux, on choisit pour cette dernière fonction un avocat de mérite, dont on rétribue les services. Dans les cités et les bourgs (boroughs), le recorder remplit la charge de juge ; mais qu’est-ce que le recorder ? C’est une sorte de trait d’union entre le barreau et la magistrature. Il exerce en effet les pleins pouvoirs d’un président de tribunal, tout en gardant quelquefois la faculté de plaider pour le compte de ses cliens devant une autre cour. Enfin les petty sessions se tiennent dans les campagnes devant au moins deux juges de paix, et dans les grandes villes devant un magistrat payé. Ces tribunaux, placés au degré le plus élémentaire sur l’échelle de la justice, ne punissent guère que les simples contraventions à la loi, et encore quiconque se trouve lésé par leurs décisions peut en appeler à la cour des quarter sessions, c’est-à-dire au conseil des juges de paix réunis.

L’institution des justices of peace est si particulière aux Anglais, qu’on m’en voudrait de ne point indiquer nettement en quoi elle consiste. Les juges de paix sont des gentlemen nommés le plus souvent sur leur propre demande par le lord-lieutenant du comté. Ils doivent jouir d’un revenu annuel de 100 liv. sterl. (2,500 fr.). Leur fonction est de préserver et de maintenir la paix de la reine. Cette définition peut sembler bien vague ; c’est pourtant celle qu’acceptent nos voisins, et qui répond le mieux à leur manière de voir. Par une fiction qui a eu le pouvoir de s’incarner dans les mœurs, la reine est censée souffrir de tout le mal qui se fait dans son royaume et en particulier des attaques dirigées contre n’importe lequel de ses sujets. Que dis-je ? il n’est même point du tout nécessaire qu’un individu ait été frappé par un autre, il suffit qu’il ait été menacé pour donner lieu à une action judiciaire. Tout Anglais provoqué de vive voix ou pair écrit peut citer son adversaire devant un tribunal. Le magistrat, si la plainte est fondée, réprimande l’homme soupçonné de nourrir de mauvais desseins et