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LA
COCHINCHINE FRANCAISE
DEPUIS L'ANNEXION DES PROVINCES DU SUD

Depuis de longues années, la France ne semble plus croire les colonies nécessaires à la grandeur et à la prospérité du pays. Nous avons presque perdu le goût de ces possessions lointaines qui créent d’immenses débouchés à l’industrie nationale, et portent, comme en Angleterre et en Hollande, la richesse expansive d’un grand état ou d’un petit royaume à son plus haut degré de puissance. Les causes de cette indifférence sont multiples, et nos pertes douloureuses au siècle dernier, nos désastres maritimes, l’ancien régime commercial, l’abolition de l’esclavage, ont beaucoup contribué à paralyser notre élan. Peu à peu notre pavillon a cessé de dominer sur les mers, les capitaux français ont abandonné les opérations coloniales, et la nation a déserté le champ des explorations lointaines. Sous tous les régimes néanmoins, les gouvernemens ont essayé de jeter encore la France dans ces grandes entreprises en créant pour nos produits, pour nos marines de guerre et de commerce des ports de relâche, des centres nationaux sur divers points du globe. C’est à cette préoccupation constante que nous devons le maintien de nos droits sur Madagascar et les établissemens de Taïti, de la Nouvelle-Calédonie, de Cochinchine ; mais ces prises de possession n’ont réveillé en France aucune ardeur, et l’esprit public ne s’en est ému que lorsque des complications fortuites, nées sur le sol même de ces contrées, menaçaient de troubler la paix de