Page:Revue des Deux Mondes - 1868 - tome 74.djvu/493

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Reventazon, et franchirait le seuil des deux mers au col d’Ochomogo, à 1,545 mètres de hauteur. Sur le versant du Pacifique, le chemin de fer parcourrait les campagnes si fertiles de San-José, puis descendrait sur les bords du Rio-Grande pour atteindre le rivage de la mer à l’excellent port de Caldera, ainsi nommé à cause des nombreuses sources thermales qui jaillissent dans les environs. Les rampes démontée et de descente, réparties sur une longueur totale de 198 kilomètres, seraient presque toutes d’une inclinaison modérée, sauf à l’ouest du plateau de San-José, où la pente d’une section de 19 kilomètres dépasserait 24 millièmes ; toutefois les ingénieurs modernes ont appris en Europe et en Amérique à triompher de déclivités encore plus fortes d’un quart ou même d’un tiers. La nouvelle voie interocéanique, à laquelle le gouvernement du Costa-Rica garantit un intérêt de 8 pour 100 et concède de vastes territoires, semble donc être relativement facile à construire, et nul doute qu’elle ne serve un jour à un trafic très considérable, car, dût-elle même être complètement négligée par le commerce général de mer à mer, elle n’en a pas moins d’avance le monopole absolu de tous les échanges de la république avec les autres pays du monde. En prévision de l’importance future de ce chemin de fer, les propriétaires s’empressent de défricher le sol des deux côtés de la voie, et les négocians de San-José, de Cartago, de New-York, achètent, pour y construire des entrepôts, les terrains encore déserts de Limon, déclaré port libre par un décret du 20 septembre 1867. Quoi qu’il advienne des grandes espérances conçues à cet égard, les hardis enfans de la Nouvelle-Angleterre ont donné au monde trop de gages de leur audace commerciale pour qu’ils puissent tarder longtemps à tirer profit, par la construction du chemin de fer du Costa-Rica ou même de plusieurs autres voies ferrées, des immenses richesses et de l’admirable position géographique de l’Amérique centrale.


II

Il vaudrait mieux toutefois que les républiques de l’isthme eussent elles-mêmes assez d’énergie et de ressources pour prendre l’initiative de ces œuvres industrielles. Au lieu d’attendre de capitalistes étrangers des voies de communication qui donnent un débouché aux produits de leurs plantations et de leurs mines, elles auraient le bonheur de prendre les devans et d’ouvrir sur leur territoire les grandes routes commerciales nécessaires aux échanges du monde. Pareille ambition ne serait point chimérique en des pays comme le Guatemala, le Salvador, le Costa-Rica, si les populations savaient oublier leurs petites rivalités nationales et s’entendre pour