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ralement, dans ses estimations des prix de revient, et, sans accepter à la lettre le chiffre de 900,000 francs par kilomètre, qui représenterait, selon M. Pouyer-Quertier, la part contributive de l’état, auquel l’intrépide député de Rouen n’arrive que par une confusion, en transportant sur les lignes nouvelles une indemnité allouée pour l’ancien réseau, on peut se demander si le chiffre officiellement accepté de 400,000 francs par kilomètre ne constitue pas lui-même une évaluation déjà bien étrange. On peut se demander si, après tous les progrès accomplis depuis vingt ans, lorsque le prix du fer, des machines, a nécessairement diminué, le chiffre de 400,000 francs, qui représente une subvention directe plus une garantie d’intérêt pour le reste, ne dépasse pas toutes les prévisions. Et ce qu’il y a d’excessif dans cette évaluation ressort d’autant mieux que le gouvernement lui-même laisse de côté ce chiffre de 400,000 francs lorsqu’il s’agit des autres lignes qu’il se borne aujourd’hui à classer, qu’il tient en réserve pour les livrer au besoin à l’industrie particulière, et qui ne sont pas l’objet de conventions avec les grandes compagnies. Ici les évaluations sont plus modestes, et elles se rapprochent beaucoup plus peut-être de la réalité des choses, puisqu’il n’est point douteux que l’industrie privée arrive aujourd’hui à construire les chemins, de fer à meilleur marché, à 200,000, à 150,000, à 120,000 fr. le kilomètre. Les chemins de l’Eure, selon M. Pouyer-Quertier, ne coûtent pas davantage. Bien d’autres pourraient être cités. Ils sont faits, dit-on, plus légèrement, avec moins de soin, d’une façon moins complète, ils ne suffiraient pas à tous les besoins d’une grande exploitation. Les explications ne manquent pas, nous le savons bien. Il n’est pas moins vrai que le moment vient plus que jamais aujourd’hui de se tenir en garde contre cette habitude de travailler chèrement qu’ont trop souvent les ingénieurs de l’état, hommes instruits, habiles, expérimentés, qui n’ont qu’un malheur, c’est que leur habileté coûte, cher. Ce qu’il y a de plus clair, c’est que, soit en subventions directes, soit en garanties d’intérêts, les charges de l’état toucheront probablement d’assez près le milliard.

Mais du moins, en compensation des avantages faits aux grandes compagnies, l’état a-t-il obtenu des réduction de tarifs ? C’est encore ici un des points qui ont été le plus vivement touchés par M. Pouyer-Quertier. Par le fait, l’état n’a rien obtenu, et, par des raisons qui ne semblent pas toutes également décisives, il ne paraît pas même s’être préoccupé de rien obtenir. La première raison, c’est qu’il y a un contrat entre l’état et les compagnies, et qu’on ne peut réviser les tarifs sans le consentement des deux parties. Or la question nous semble ici tranchée par un fait bien simple. S’il est possible de toucher au contrat pour assurer de nouveaux avantages aux compagnies, pourquoi ne pourrait-on pas y tour cher également pour demander une révision des prix de transport ? La seconde raison, et celle-ci est plus sérieuse, elle est d’un ordre tout