visionnement l’intervention de l’autorité municipale, représentée par la préfecture de la Seine et par la préfecture de police. C’est à cette dernière administration qu’incombent la tâche la plus lourde et les précautions les plus subtiles, car il est naturel que le magistrat responsable de la tranquillité publique ait la haute main sur tout ce qui touche à la grosse question des subsistances. Grâce à notre législation sur la matière, grâce aux excellentes mesures administratives que nous venons d’indiquer, cette question est devenue de jour en jour moins redoutable; l’impulsion donnée est acquise et ne se ralentira pas. On a profité habilement des fautes du passé pour faire face aux nécessités du présent et assurer l’avenir. Quoique la moins-value des monnaies métalliques et l’agglomération sur un seul point d’une population énorme rendent la vie matérielle de plus en plus chère, celle-ci garde son niveau, elle est en rapport direct avec l’augmentation des salaires et de la fortune générale. L’important, c’est que les denrées ne manquent pas, et tous les moyens sont mis en œuvre pour les attirer en abondance. Les compagnies de chemins de fer ont compris de la façon la plus libérale le rôle bienfaisant qu’elles étaient appelées à remplir dans l’alimentation publique. Successivement et selon les circonstances, elles ont abaissé leurs tarifs jusqu’à les mettre à la portée des plus petites bourses. Dès qu’un colis dépasse un certain poids réglementaire, on obtient pour lui des facilités de transport considérables. La denrée, ne payant que fort peu pour arriver à Paris, se vend naturellement moins cher, et c’est en somme le consommateur qui profite de tous les avantages accordés au commerce. Au fur et à mesure que, continuant la construction de leurs réseaux, les chemins de fer s’éloignent de Paris, ils ouvrent des débouchés nouveaux, pénètrent dans des centres de production fermés jadis, et qui maintenant s’empressent, car leur intérêt les y pousse, d’établir des relations avec Paris. Loin de craindre que les marchés restent parfois dégarnis, on aurait plutôt à redouter un encombrement momentané, si les nations voisines, connaissant nos inépuisables ressources, ne venaient bien souvent s’alimenter à Paris même. On a résolu ce problème difficile : pourvoir à tous les besoins d’une population immense sans qu’elle puisse jamais concevoir un sentiment d’inquiétude, et sans même qu’elle s’aperçoive des précautions prises pour assurer le service de son alimentation. Et cependant l’approvisionnement que nécessitent ces besoins est énorme. Il est curieux d’en étudier le détail et de raconter les différentes opérations à l’aide desquelles nous nous procurons chaque jour le pain, la viande et le vin, qui sont les trois élémens primordiaux de l’alimentation parisienne.
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