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14,659,850 kilogrammes en occupent 52,280, et enfin en 1866 14,166,866 kilogr. arrivent sur 78,604 voitures. Ainsi de 1859 à 1866 la quantité de poisson de mer s’est accrue de 22 pour 100, et le nombre des voitures destinées à le transporter a augmenté de 391 pour 100. En décembre 1866, la moyenne de chaque chargement est de 155 kilogrammes ; c’était abusif au premier chef, et les expéditeurs se plaignirent hautement, car un tel état de choses faisait retomber sur eux des charges très lourdes. Un chargement de poisson expédié de Boulogne à un commissionnaire et valant 65 fr. avait été réparti en gare sur 17 voitures différentes louées à raison de 3 francs l’une ! Pour arrêter le mal d’un seul coup et empêcher qu’il ne se renouvelât, une ordonnance de police datée du 23 février 1867 déclare que les voitures transportant la marée cesseront d’être considérées comme unités servant de base au règlement des tours de vente, que les marchandises des divers expéditeurs seront présentées alternativement et suivant l’ordre successif des arrivages, que le nombre des lots sera de un par centaine ou fraction de centaine de kilogrammes. C’est la lettre de voiture ou le bulletin d’expédition qui fait foi et permet de se reconnaître facilement au milieu de tous ces paniers de forme et de contenance diverses qui, au moment où la vente va s’ouvrir, encombrent les abords du pavillon n° 9.

Le poisson, déballé, est placé sur de larges paniers plats assez semblables à des éventaires, et porté sur l’un des huit bancs de vente qui entourent le marché. Ce travail, qui exige une certaine habileté, car il faut assembler les espèces, faire les lots de manière qu’ils ne soient ni trop forts ni trop faibles, présenter les marchandises sous l’aspect le meilleur, sans cependant en dissimuler les défauts, est accompli par des agens spéciaux au nombre de 16 ; on les appelle verseurs. Ils passent le poisson ainsi préparé à l’un des 34 compteurs-crieurs qui sont chargés d’annoncer la denrée mise en vente, de recevoir les enchère, et d’indiquer aux commis du facteur le nom de l’acquéreur. — Malgré le tumulte, les cris, les plaisanteries salées qui s’entre-croisent, tout se passe avec ordre et célérité. C’est dans cette circonstance surtout que le temps est de l’argent. Aussi les corbeilles où brillent les poissons nacrés ne font-elles que paraître et disparaître. Lorsque d’aventure une pièce rare a été apportée, saumon gigantesque, esturgeon monstrueux, des hommes vont la criant à grands efforts de voix parmi les halles pour prévenir les marchands, et exciter la concurrence. La vente et ensuite l’étalage sont surveillés par l’inspecteur du marché, qui fait impitoyablement enlever, mettre en fourrière et jeter aux ordures tout poisson qui lui paraît insalubre. C’est dans ce même pavillon