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une rédaction de ces phénomènes religieux aux mêmes lois de l’esprit humain, quelles qu’en soient d’ailleurs la valeur intrinsèque et la portée historique. Le surnaturel étant le principe de toutes les religions, le miracle en étant la condition, l’autorité en étant le moyen d’enseignement et de conservation, il n’est plus permis qu’aux croyans des diverses religions de se faire illusion sur toutes ces choses, et d’expliquer avec eux telle religion comme une œuvre de Dieu, telle autre comme une œuvre du démon. La critique vaut pour tous les monumens religieux, ou ne vaut pour aucun. Si elle n’est pas applicable à la Bible, elle ne l’est pas davantage aux Védas, au Zend-Avesta, ou à tout autre livre de ce genre. En second lieu la véritable supériorité d’une religion sur une autre se mesure, non plus sur son origine dite surnaturelle, mais sur son degré de valeur métaphysique ou morale. L’histoire des religions est soumise à la même loi de progrès que l’histoire de toutes les œuvres de l’esprit humain, par la raison très simple que l’œuvre religieuse a la même origine que les autres. Si le christianisme est la plus parfaite des religions, cela tient à ce qu’il est venu après toutes les autres, et qu’à l’enseignement évangélique très simple qui fut son point de départ il a successivement ajouté une métaphysique toute grecque transfigurée par le symbolisme de l’Orient. En troisième lieu, si les idées ne suffisent pointa expliquer historiquement une grande révolution religieuse comme le christianisme, si les grandes individualités y jouent leur rôle, il ne faut pas pour cela rechercher l’origine d’une religion hors de l’ordre des causes naturelles. Il en est des religions comme des autres grands phénomènes historiques, comme des peuples qui naissent, des empires qui se forment, des cycles poétiques qui se développent, des écoles de morale ou de législation qui se produisent. Le génie, la vertu, l’héroïsme des individus, y ont une part que l’obscurité des origines ne permet pas de mesurer au juste, mais dont l’indétermination n’oblige point à recourir à des causes surnaturelles. L’histoire religieuse ne peut échapper aux règles de la critique scientifique. L’authenticité des textes s’y établit de la même façon, la réalité des faits s’y constate et s’y vérifie par les mêmes procédés que dans l’histoire politique, littéraire ou philosophique. Si les textes sacrés sont obscurs, ou apocryphes, ou incomplets, ou contradictoires, ils ne peuvent pas plus fonder une certitude là que partout ailleurs. La critique a donc prise sur les Védas, sur le Zend-Avesta, sur la Bible, comme sur Homère. Les origines de l’histoire juive ne peuvent pas être traitées par une autre méthode d’examen que les origines de l’histoire grecque ou de l’histoire romaine.

L’histoire religieuse ainsi comprise, tout s’éclaircit et s’explique dans ses symboles, ses mythes et ses légendes. Ce qui n’était que