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gées d’êtres vivans et mises ensuite à l’abri des poussières. Est-il sans intérêt de faire remarquer combien les observations de Leeuwenhoek tendaient à établir cette vérité? L’eau de la pluie qui commence à tomber contient parfois quelques animalcules; mais cette eau n’a-t-elle pas entraîné les poussières qui circulaient dans l’atmosphère? L’eau de la pluie qui tombe depuis un certain temps n’offre aucun organisme vivant; dans cette même eau conservée à l’air libre, les infusoires apparaissent seulement après deux jours écoulés, et ne se montrent en abondance que les jours suivans. De l’eau provenant de la fonte de la neige et préservée de toute atteinte de l’air extérieur ne contient pas un seul animalcule, et ce n’est qu’après une exposition à l’air durant plusieurs jours qu’on y découvre des infusoires. De semblables observations n’étaient certes pas suffisantes pour ôter toute incertitude sur le mode de propagation des créatures microscopiques, mais elles permettaient déjà d’entrevoir la vérité sur cette question, et c’était un grand pas. On a souvent parlé, et avec raison, de la nécessité de faire les expériences en écartant toutes les chances d’erreurs possibles. Cependant il nous paraît curieux de rappeler une expérience assez concluante due au hasard. Deux bocaux d’égale dimension, contenant à peu près la même quantité d’eau et les mêmes débris de plantes aquatiques, avaient été fermés par un couvercle de papier et placés sur un balcon. Le vent enlève l’un des deux couvercles qu’on ne remplace point; après un certain temps, on examine le contenu des deux vases ; dans le vase fermé par un simple morceau de papier, il y a très peu d’infusoires; dans le vase demeuré ouvert, il y en a en quantité. Le rôle du plus simple abri n’était-il pas démontré par ce fait ?

L’année même qui avait été signalée par la découverte des infusoires n’était pas encore écoulée, et déjà une autre découverte saisissante due à l’observation microscopique est annoncée. En étudiant du nom de Ham croit avoir vu des animalcules dans la liqueur fécondante. Leeuwenhoek, instruit de cette remarque, regarde à son tour; plus de doute possible, la liqueur contient une prodigieuse multitude de petits corps qui s’agitent sans cesse. Le micrographe, frappé de leurs mouvemens, n’hésite pas à les regarder comme des animaux; saisi de leur nombre incalculable, il estime qu’on en voit plus d’un millier dans l’espace qu’occuperait un grain de sable. La Société royale de Londres ayant reçu communication de cette découverte, l’observateur fut invité à poursuivre ses recherches sur la liqueur fécondante des animaux. La réponse ne se fit pas attendre. Leeuwenhoek s’assura tout de suite chez le chien, le chat, le lapin, de la présence de corpuscules analogues à ceux qu’il avait déjà décrits. Plus tard s’offrit l’occasion