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LA
SUISSE ET SES BALLADES

I. Liederchronik der Eidgenossenschaft, von Dr Rocholz. — II. Die Urschweiz, Land und Leute, von Qsenbrügg, Berlin 1867. — III. Les Origines de la Confédération suisse, par M. A. Rilliet, Genève, 1868. — IV. Die Sage vom Tell, von Ludwig Häusser. — V. Recherches critiques sur Guillaume Tell, par M. Hîsely. — VI. Die Waldstätte mit einem Anhang über Wilhelm Tell, von Alfons Uber, Inspruck, 1862.

Les pays changent de physionomie ainsi que les hommes. Aujourd’hui la Suisse nous semble une idylle vivante ; il y a trois ou quatre siècles, elle n’était rien moins que bucolique. À ce nom de Suisse, dont les vers et la prose ont abusé sans lui ôter sa poésie, un monde de bergers apparaît à l’imagination. On croit toujours les voir monter avec leurs troupeaux, de saison en saison et d’étage en étage, ces montagnes dont Jean-Jacques Rousseau, Ramond et Töpffer permettent au lecteur de faire l’ascension sans quitter son fauteuil. On croit toujours les entendre, au coucher du soleil, appeler dans le lointain avec des notes gutturales les vaches paresseuses. Le voyage même, au lieu de dissiper l’enchantement, le fortifie : quand on voit ce pays si calme et si riant sillonné d’allées comme une promenade publique, commode et bien tenu à l’égal d’un jardin, le moyen de s’imaginer qu’il n’a pas toujours été ainsi ? Si vous interrogez la littérature, elle affuble les bergers de cette pastorale d’un appareil philosophique. Gessner est à demi oublié ; mais ses églogues ne le sont pas, et quoiqu’elles n’aient plus de lecteurs, ce sont elles qui ont établi la réputation de la Suisse comme terre de l’âge d’or, de ses habitans comme bergers de Théocrite et de Virgile améliorés pour l’esprit et pour le cœur, surtout pour le cœur.