Page:Revue des Deux Mondes - 1868 - tome 77.djvu/599

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ciale d’ouvriers s’occupait d’ailleurs de confectionner les hauts et bas-de-chausses. On les appelait boursiers-culottiers. Enfin, sous Henri III, un édit de 1581 institua de nouveaux règlemens pour la corporation ; tous les ouvriers furent réunis sous la dénomination commune de tailleurs d’habits ; c’est celle qui est encore usitée de nos jours. Parmi les matières premières employées par les tailleurs, la France avait la spécialité de produire les draps. Les draps des Gaules étaient, dit-on, recherchés sous la domination romaine. En tout cas, depuis le Xe siècle, on fabriquait des tissus estimés en Normandie et en Picardie. Le prix des draps fins était fort élevé. Une aune de bon drap sous Charles V était payée plus de 100 fr. En 1463, l’aune de drap brun pour faire une robe au roi Louis XI coûtait 110 francs, et le drap violet 130 francs. Le peuple s’habillait de tiretaine et d’étoffes communes à chaîne de fil et à trame de laine. Au XVe siècle, la France tirait d’Italie les draps d’or et d’argent, les toiles d’or, les velours et les satins ; mais le travail de la laine continuait à être une industrie nationale. En 1565, Charles IX défendit sous les peines les plus sévères l’exportation des moutons vivans ; les délinquans avaient la main gauche coupée par le bourreau. François Ier, puis Henri IV, rendirent plusieurs ordonnances pour prohiber l’entrée des draps en France. La communauté des tailleurs fut longtemps régie par l’édit de 1581. Les abus de pouvoir commis par les jurés qui étaient à la tête de la corporation amenèrent une crise : en 1776, l’édit de Henri III fut supprimé avec beaucoup d’autres ordonnances relatives aux jurandes et aux maîtrises. Ce ne fut pourtant qu’en 1790 que disparurent les dernières traces de la réglementation corporative.

On dit que l’industrie des papiers peints est fort ancienne en Chine ; mais elle ne commença de prospérer en France que vers la fin du XVIIIe siècle. Un marchand mercier, nommé Réveillon, établit rue de Montreuil, dans le faubourg Saint-Antoine, une immense fabrique que Louis XVI érigea en manufacture royale dans l’année 1784. C’était un homme dur que ce Réveillon. Il était très impopulaire dans les faubourgs de Paris. On l’accusait d’avoir dit que « quinze sous suffisaient à un ouvrier pour vivre une journée, que l’ouvrier pouvait bien se nourrir de farine de pomme de terre et laisser la farine de froment pour les classes aisées. » La foule exaspérée se rua sur la manufacture de Réveillon, qui fut pillée et brûlée le 19 avril 1789. Ce fut le prélude de la révolution. Le faubourg Saint-Antoine est cependant resté le centre de la fabrication des papiers peints, et il y existe aujourd’hui soixante fabriques de ce genre. Quelques essais furent tentés sans résultats utiles à Mâcon, à Lyon, à Mulhouse ; il n’y eut en province qu’un seul établis-