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séricipares est poussée régulièrement dans les deux tubes étroits qui les terminent. Les deux fils très fins qui en sortent se réunissent en un seul, et celui-ci vient passer à travers une autre filière pratiquée dans la lèvre inférieure de la chenille. Pendant ces opérations, la soie n’a pas été seulement étirée en filamens déliés, elle s’est aussi recouverte d’un vernis qui lui donne ce brillant si recherché pour les étoffes.

La chenille choisit d’abord un lieu convenable afin d’y construire l’abri qui doit la préserver des ennemis extérieurs pendant la période où elle attend, immobile et inerte, sa dernière métamorphose. C’est la couleur de quelques points de son enveloppe provisoire qui a fait donner à l’insecte de l’une des espèces, puis à tous les insectes des familles voisines, quand ils sont dans cet état, le nom de chrysalides, qui signifie doré. Un mince fil de soie sort de la lèvre inférieure de la chenille séricifère, il est recouvert du vernis particulier fourni par deux petites glandes, et qui le rend gluant et adhésif. L’insecte, dont on peut suivre tous les mouvemens tant que l’habitation de soie qu’il se prépare est encore peu épaisse, va successivement attacher ce fil à différens points bien choisis ; il établit de cette manière la première charpente qui soutiendra tout le cocon et qui en indique déjà la forme future ; puis il commence à étirer régulièrement son fil et à le contourner autour de lui pour former les murailles de sa demeure, qu’il cimente avec le vernis dont nous avons parlé. On remarque même que, lorsque ce vernis se trouve fourni moins abondamment par les glandes vers la fin de l’opération, l’adhérence devient moins forte. Aussi les parties intérieures du cocon sont-elles plus faciles à dévider que les parties externes, les premières façonnées. Pour opérer le dévidage, il faut diminuer d’abord l’adhérence des fils de soie. On y parvient au moyen de l’eau chaude, qui ramollit le vernis sans l’enlever et sans faire disparaître le brillant qu’il donne aux fils. On réussit même à conserver à ceux-ci une certaine adhérence et à réunir ensemble les fils de plusieurs cocons pour former ces belles soies grèges que l’on admire dans toutes les expositions.

On le voit, rien de plus simple que la série d’opérations au moyen desquelles la chenille, sans autres matériaux que la feuille du mûrier, prépare et file la soie. Aussi des hommes inventifs, doués peut-être de plus d’imagination que de science chimique et physiologique, ont-ils pensé qu’il serait facile de se passer de l’intervention de l’insecte et de faire de la soie de toute pièce en traitant directement le feuillage des mûriers. C’était économiser tout ce que le bombyx en emploie à sa propre nourriture. L’idée était séduisante ; mais l’exécution n’a pas répondu jusqu’ici aux espérances