liantes que le chargé d’affaires d’Espagne acceptait comme suffisantes pour clore le débat. Il se fût passé quelque chose d’analogue à l’arrangement qui interviendrait entre particuliers dans une querelle née sans motifs bien sérieux, celui qui se reconnaîtrait de légers torts consentant à offrir des excuses que son adversaire l’empêcherait courtoisement de formuler. Les griefs de l’Espagne contre le Chili n’avaient pas en réalité un tel caractère d’importance et de gravité que ce mode d’accommodement dût paraître insuffisant. On refusa pourtant à Madrid d’y accéder. L’influence de l’amiral Pareja paraît avoir pesé sur les déterminations du maréchal Narvaez. Tandis que le représentant de l’Espagne au Chili faisait de la conciliation, les journaux de Madrid publiaient des adresses venues des côtes du Pacifique, où les Espagnols résidans en Amérique poussaient l’Espagne à user de rigueur contre les arrogantes prétentions de ses anciennes colonies. Peut-être l’amiral Pareja, trop dédaigneux des sentimens des républiques du Pacifique, crut-il qu’un châtiment infligé au Chili frapperait de terreur les révolutionnaires péruviens, qui faisaient tomber le gouvernement du président Pezet sous l’accusation d’avoir cédé à l’Espagne; mais le maintien de l’occupation et de l’exploitation des îles Chinchas n’eût-il pas suffi pour obtenir sûrement la ratification et l’exécution du traité antérieurement signé?
Le 17 septembre 1865, la frégate espagnole Ville-de-Madrid, portant le pavillon de l’amiral, parut en rade de Valparaiso. Cinq navires de guerre la suivaient. L’amiral en avait laissé deux au Callao. C’était le premier jour des fêtes anniversaires de l’indépendance. Le peuple attiré sur les quais pour prendre part aux réjouissances accueillit cette menaçante apparition aux cris répétés de vive le Chili! Tout à coup, pendant qu’à l’horizon les bâtimens ennemis arrivaient successivement au mouillage, les mille voix de la foule entonnèrent à la fois l’hymne national. Le peuple chilien acceptait la lutte, et portait un défi à l’Espagne. Pour le moment l’amiral Pareja se bornait à établir devant Valparaiso un blocus rigoureux qu’il prétendit étendre à toute la côte chilienne.
Le gouvernement chilien, montrant, dans le temps même où il comptait encore sur une solution pacifique, une prévoyance et une activité peu ordinaires chez les gouvernemens sud-américains, avait cherché à se préparer autant qu’il lui était possible en vue de toutes les éventualités. Il avait sollicité du congrès une augmentation de l’effectif de l’armée; il avait acheté aux États-Unis une corvette de 6 canons de gros calibre; il négociait à New-York l’acquisition d’un autre navire de guerre; il avait commandé en Angleterre deux corvettes de 1,200 chevaux à cuirasses mobiles livrables en janvier 1866.