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Page:Revue des Deux Mondes - 1868 - tome 78.djvu/797

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5,821,108,324 fr. 50 c ; dans ces quantités, se rapportant à une courte période de quinze ans, l’argent n’entre que pour la somme relativement minime de 311,423,149 fr. 50 cent. ; le reste, plus de 5 milliards 1/2, appartient à l’or[1]. Ce seul fait explique et au-delà le renchérissement successif de toutes les denrées, de tous les objets de consommation, en un mot de ce qu’on nomme la vie matérielle. Le métal monétaire perdant progressivement de sa valeur par suite de l’abondance avec laquelle on le produit, doit-on s’étonner d’assister à une augmentation de prix en rapport avec la moins-value forcée des monnaies ? C’est là un phénomène naturel, mais qui n’en est pas moins singulièrement pénible et douloureux pour les personnes qui, n’exerçant point une fonction propre à les enrichir, voient chaque jour diminuer l’importance de leurs revenus, quoique le chiffre nominal en reste le même.


III

L’ancienne monnaie des médailles était aux Etuves. Vers le commencement du XVIIe siècle, elle fut transportée au rez-de-chaussée de la grande galerie du Louvre construite par Henri IV. Sous la révolution, on la ferma ; elle fut réorganisée en 1804 par Napoléon, qui en fit une annexe de l’hôtel du quai Conti. Jusqu’en 1830, le balancier des médailles releva directement de la liste civile ; mais depuis cette époque il est exploité par le directeur de la fabrication des monnaies. Les médailles, œuvres d’art commémoratives d’un événement important ou d’un grand homme, n’ont aucun caractère légal, et ne servent point aux échanges. Elles n’ont pas besoin par conséquent d’être frappées avec rapidité ; aussi elles ont échappé à la presse, et sont restées soumises au balancier, instrument d’une certaine lenteur, d’un maniement pénible, mais à l’aide duquel on peut obtenir des résultats excellens. Les ateliers des médailles, soumis aussi au contrôle de la commission, sont séparés des ateliers où l’on frappe les monnaies. Ce sont de grandes salles situées au rez-de-chaussée, et dans lesquelles les balanciers, solidement établis sur d’épais massifs en maçonnerie, étendent les longues barres de fer armées de boules de cuivre à l’aide desquelles on les fait mouvoir. Napoléon, qui avec sagacité portait un très sérieux intérêt à la beauté des monnaies et des médailles frappées sous son règne, ne manqua point de donner quelques canons ennemis pour faire des balanciers. Ces derniers sont

  1. À ces sommes, il faut ajouter 59,300,000 francs de monnaies de bronze, qui toutes ont été frappées depuis l’établissement du second empire. (Loi du 6 mai 1852.) Voyez sur ce sujet une très curieuse brochure de M. Ernest Dumas : Note sur l’émission en France des monnaies décimales de bronze. Imprimerie impériale, 1868.