Page:Revue des Deux Mondes - 1868 - tome 78.djvu/846

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

la chasse ou de la fuite, emportés par le vent, ils ont pu, dit-il, tomber à quelque distance du rivage dans des roseaux, dans des herbages, qui leur fournirent quelques alimens tout en les empêchant de reprendre leur vol vers la mer. Alors, sous l’influence de l’air, les nageoires se fendirent, les rayons qui les soutiennent se transformèrent en plumes dont les membranes desséchées formèrent les barbules, la peau se couvrit de duvet, les nageoires ventrales devinrent des pieds, le corps se modela, le cou, le bec, s’allongèrent, et le poisson se trouva devenu un oiseau. »

Rien de plus simple pour Telliamed que la transformation des espèces marines rampantes en reptiles aériens. Ne voit-on pas ces derniers vivre dans l’eau presque aussi facilement que sur la terre ? Les mammifères sont plus embarrassans. Cependant l’auteur cite rapidement les ours marins, les éléphans de mer, puis il donne quelques détails sur les phoques. Après avoir rappelé leurs habitudes et affirmé qu’on a vu ces animaux vivre plusieurs jours à terre, il ajoute : « Il n’est pas impossible qu’ils s’accoutument à y vivre toujours par la suite, par l’impossibilité même de retourner à la mer. C’est ainsi sans doute que les animaux terrestres ont passé du séjour des eaux à la respiration de l’air. » Enfin arrivé aux espèces humaines, il en admet la multiplicité. Telliamed réunit toutes les prétendues histoires d’hommes marins, et en conclut que nous aussi nous devons chercher dans la mer nos premiers ancêtres.

En résumé de Maillet partage les êtres organisés en deux grands groupes, l’un aquatique et marin, l’autre aérien et terrestre. Partout le premier a engendré le second. La filiation est directe, chaque espèce marine donnant naissance à l’espèce terrestre correspondante. La transformation est le plus souvent individuelle et analogue à la métamorphose de la chenille en papillon ; elle peut s’accomplir aussi dans certains cas par le transport des œufs, qui, pondus par un animal marin, mais exposés à l’air, donnent naissance à des individus terrestres. Quelques espèces vivant presque indifféremment à l’air et dans l’eau peuvent, semble-t-il croire, être considérées comme des « intermédiaires momentanés » entre les deux mondes ; mais dans aucun cas l’hérédité n’a de rôle dans ces phénomènes. La transformation s’opère toujours sous l’empire de la nécessité, imposée par ce que nous appellerions aujourd’hui le milieu, et de l’habitude, qui façonne rapidement l’organisme. Le développement des êtres organisés marins a commencé peu après que les montagnes les plus élevées eurent été mises à sec ; celui des espèces terrestres date seulement d’une époque à laquelle les continens étaient à peu près ce qu’ils sont aujourd’hui. Ce développement est