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peries ont rendu la critique défiante à l’endroit des documens dits autographes, et l’on demande avec raison qu’à l’examen des pièces mêmes on s’efforce d’ajouter quelques lumières sur la provenance.

Tout cela cependant est peu de chose en comparaison du zèle déployé par M. Lavallée et des services qu’il a rendus. Il a réuni un très grand nombre d’originaux ou de copies authentiques entièrement inconnus avant lui ; il les a publiés, nous le disons après vérification, avec une préoccupation constante d’exactitude : aussi nous est-il permis enfin de connaître la vraie Mme de Maintenon. Quiconque, écrivant sur l’histoire de cette femme célèbre avant ces trois dernières années, s’est appuyé sur des citations a été trompé par des lettres ou des mots apocryphes ; nous ne connaissons pas un seul historien de Mme de Maintenon qui ait été entièrement à l’abri de ce danger. Il ne faut pas en excepter M. Lavallée lui-même, qui, dans son Histoire de la maison de Saint-Cyr, publiée antérieurement, cite comme tous les autres les pièces, les paroles et les billets les moins authentiques. Ces faux documens offrent toujours, bien entendu, les traits les plus en relief ; de tous, La Beaumelle a été le spirituel, l’amusant et l’audacieux auteur. Il y aurait intérêt à s’entendre enfin, et il serait temps de ne plus répéter, en les attribuant à Mme de Maintenon, un certain nombre de mots devenus à tort célèbres, et qui n’ont jamais été ni dans sa pensée ni sur ses lèvres. Ce travail de critique un peu délicate devient possible, si nous ajoutons aux lumières que donnent les recherches de M. Lavallée celles des documens précieux que nous avons entre les mains. Les trois volumes manuscrits des archives de Mouchy nous permettent d’abord de juger exactement de la méthode suivie par La Beaumelle, puis par M. Lavallée dans leurs publications ; mais en outre ils contiennent des séries de lettres importantes encore inédites. Voici de plus tout un dossier de lettres de Mme de Maintenon aux dames de Saint-Cyr, notamment à Mme de Brinon, que M. Campardon possède en copie très authentique ; un certain nombre sont inédites, et plusieurs, déjà connues, s’offrent avec des additions ou des différences notables. M. Campardon a bien voulu mettre tous ces documens à notre entière disposition. Nous avons enfin comparé les volumes de M. Lavallée avec les papiers de Saint-Cyr, conservés en manuscrit au grand séminaire de Versailles. Nous pourrons donc, en ajoutant aux démonstrations du dernier éditeur des traits nouveaux, montrer d’abord au vrai quel avait été le curieux travail fait au XVIIIe siècle sur les lettres de Mme de Maintenon, et dégager ensuite de quelques fausses couleurs, longtemps persistantes, une figure historique au sujet de laquelle on a tant disputé.