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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




31 janvier 1869.

Quand on suit les événemens contemporains d’un regard attentif, avec une bonne volonté également exempte d’illusions et de découragement, on est porté à se dire que peu de momens ont eu un intérêt plus saisissant que celui où nous sommes. De toute façon et depuis quelques années déjà, c’est la phase prolongée des transitions et des fluctuations. On croit toujours arriver, on n’arrive pas, et on finit par se dire que la vie se passe peut-être à ne pas arriver et à faire bravement son œuvre de chaque jour. À l’extérieur, il s’agit de savoir si la paix sortira victorieuse de toutes les épreuves auxquelles elle est périodiquement soumise. Elle n’ira pas sans doute se briser sur cet incident gréco-turc dont on n’a pas encore le dernier mot. Le gouvernement hellénique y regardera probablement à deux fois avant de fausser compagnie à la diplomatie et de se jeter dans une périlleuse aventure ; mais, même après avoir dépassé cet écueil, la paix reste assurément à la disposition de bien des volontés, de bien des circonstances, jusqu’à ce que les relations de l’Europe aient retrouvé leur équilibre, jusqu’à ce qu’on ait reconquis les gages d’une sécurité nouvelle. À l’intérieur, il s’agit de savoir si la France, toujours tyrannisée par les excès contraires, arrivera enfin à prendre possession d’elle-même, à se gouverner selon ses instincts, si elle cessera d’être une démocratie tour à tour anarchique ou aplatie pour devenir une démocratie échauffée, vivifiée par cette belle et simple chose qui s’appelle la liberté, une liberté réelle, sérieuse, pratique. Subsidiairement il s’agit de savoir ce que font les partis, ce que fait le gouvernement lui-même, pour pousser la France dans cette voie, la seule où la paix intérieure puisse être une vérité. C’est en face de ce double problème, toujours présent, que s’engage la campagne politique nouvelle, cette campagne qui commence par la délibération d’une conférence européenne et par l’ouverture de la session législative de France. Et d’abord le discours impérial adressé l’autre jour à nos chambres est à coup sûr le premier docu-